Projet SARA : Renforcement de la production agricole en territoire Aramisi

 

La ville de Cochabamba en Bolivie est réputée pour son université agronome et sa spécialité en agro-écologie. Pourtant, c’est à l’extérieur de la ville, perdu dans les montagnes à près de 4000 m d’altitude que se tient un des meilleurs exemples de cas pratique de cette activité. Là où le relief ne facilite pas la production agricole, un groupe d’ingénieurs agronomes travaille en collaboration avec deux paroisses locales afin d’améliorer les techniques de production locales. Rencontre avec Séraphin, défenseur d’une véritable agriculture durable pour des communautés abandonnées à leur territoire.

 

 

De la spiritualité à l’agronomie

 

En 1996, la communauté Aramisi a vu arriver 2 ingénieurs agronomes et coordinateurs de projets, sous la demande du père de la paroisse, P. Axel Gerling. Cet homme de foi travaille déjà sur les thèmes de la santé et de l’éducation avec les communautés avoisinantes. Voyant que la majorité des familles n’a même pas accès à l’auto-production (les pères et fils partant à la ville pour trouver l’eldorado), il décide de faire appel aux ingénieurs agronomes. Le projet SARA (Servicio de Asesoria Rural Ayninakuy – Service de Conseil Rural Mutuel) est né. Grâce à des fonds internationaux allemands, l’objectif central est de maitriser la production, tout en renforçant la foi des populations dans leur territoire. En effet, les populations indigènes ont une forte croyance dans la « Pachamama » alias « mère nature » en langue Queschua.

 

Le centre paroissial se transforme alors en un véritable terrain d’expérience et lieu de formation. German Vargas et Ricardo Crespo commencent leur travail de production avec 4 familles. Aujourd’hui, c’est 400 familles qui ont bénéficié des connaissances en agronomie et peuvent désormais vendre sur les marchés locaux en plus de subvenir à leur propre consommation. Le secret de leur réussite? La maîtrise des ressources territoriales et le respect des plans « naturels ».

 

 

Oui, car avant d’orienter véritablement leurs actions vers l’agro-écologie, il fallait transformer le terrain montagneux en un véritable lieu de production. Pas simple sur le papier, les ingénieurs ont mis en place un système de terrasses adapté au relief. Un véritable découpage qui favorise la surface de production tout comme l’écoulement des eaux de ruissellement et leur infiltration, mais limite aussi l’érosion des sols. Depuis 3 ans, la protection du sol et surtout de sa fertilité deviennent alors le centre du projet. Le centre paroissial évolue lui aussi ses formations vers les pratiques d’agro-écologie

 

 

Le programme SARA : 4 objectifs indissociables sur 3 ans.

 

Récemment arrivé dans l’équipe, Séraphin nous présente le centre et plusieurs productions agricoles de la communauté. Son entrée est dûe à l’évolution du projet SARA. Désormais, 4 « piliers » sont traités simultanément:

1) La protection du sol et de sa fertilité

2) La gestion et l’optimisation des systémes d’irrigation

3) La mise en place d’un système de production diversifié basé sur la polyculture rapprochée et l’intégration dans l’environnement naturel de base.

4) La réintroduction d’espèces arboricoles anciennes

 

 

Ici, la famille des pesticides a été bannie il y a bien longtemps, car originairement inexistante. « Si un insecte vient détruire ma plantation, c’est ce que nous avons fait une erreur » nous affirme Seraphin « C’est un simple indicateur, à nous de faire le nécessaire pour rectifier le tire, mais nous ne parlons pas de maladie à éradiquer ». Et quand on parle des biopesticides (qui sont en fait des substances naturelles controlant certaines maladies des plantes), Seraphin est clair « ils ne changent que la couleur de l’étiquette, et ne sont développés que pour le business ».

 

Quelles sont alors les solutions pour garantir la fertilité du sol? « Expérimenter et apprendre de la nature environnante, le désordre est bien l’ordre de la nature!« . En ce qui concerne le premier point, les ingénieurs se sont penchés sur des engrais organiques, de véritables « bouillons » adaptés pour certaines cultures, à base d’eau et de minéraux organiques. Les formules magiques n’existent pas, mais l’analyse des sols permet de décortiquer le « matériel organique » nécessaire au développement des plantes. Nous analyserons le deuxième point plus précisément dans l’article suivant.

 

 

L’irrigation reste un des problèmes majeurs dans ces régions à deux saisons annuelles. Les pluies abondent de novembre à mars mais se font rares le reste de l’année. Il a fallu optimiser la gestion des sources d’eau naturelles montagnardes. Une technique de stockage d’eau sous la forme d’un puits circulaire a été envisagée, récupérant les faibles courants d’eau. Un système de canalisation permet ensuite d’innonder les terrasses les unes après les autres par gravitation, le puits étant toujours situé au point le plus haut de la production agricole. D’autres systèmes comme l’arrosage rotatif permettent de réduire la consommation d’eau, sans consommer d’énergie complémentaire.

 

 

Pourquoi réintroduire enfin des espèces d’arbres  »originaires »? Pour la diversité naturelle, les apports nutritionnels au sol dans cette région au climat montagneux, mais aussi pour la qualité du bois. « Certains arbres anciens donnent du bois doux pour la fabrication d’instruments de musique comme le Charango (petite guitare d’Amérique latine), tout comme des ustensiles de cuisine. »

 

Au total, le centre parroquial accueille 7500 m2 d’agriculture, et produit une grande variété de légumes, fruits et céréales pour la propre consommation des membres du centre. Tous les ans, plusieurs séminaires sont organisés au centre, qui peut accuellir 40 personnes sur plusieurs jours. Des ingénieurs étrangers viennent participer et apprendre des techniques boliviennes, notamment le chilien Enzo Solaris, que nous avions rencontré au « Canelo de Nos« . Preuve qu’une mini-articulation se met en place…

 

Vos reporters sur place

 

MG-MT

 

 

 

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2 réflexions au sujet de « Projet SARA : Renforcement de la production agricole en territoire Aramisi »

  1. Interessant le projet Sara,il suffit qu’on leur donne les moyens,le courage ne leur manque pas il faut les mettre sur la bonne voie,bravo à ceux qui les aide.

  2. Bravo pour votre blog et vos initiatives.
    J’irai avec plaisir voir votre exposition sur votre périple, profitable à tous.
    Si vous ne l’avez déjà vu, je vous recommande le film « Même la Pluie » d’Iciar Bollain sur la privatisation de l’eau à Cochabamba.

    Karine / Pordicaise

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