NorteSur et Gente Nueva stimulent le dynamisme populaire de Bariloche

 

Aux premiers abords, San Carlos Bariloche se caractérise comme une petite station balnéaire coquète. Bordée par le lac Nahuel Huapi, la ville voit défiler les touristes en toute saison, offrant à la fois les joies du ski en hiver et les activités outdoor en été. Les jeunes l’apprécient pour ces discothèques réputées. Cependant, en montant les collines de la ville, un paysage très populaire s’offre à nous. Les routes ne sont plus goudronnées, la poussière vole. C’est dans ses quartiers reculés que les organisations NorteSur et Gente Nueva travaillent au jour le jour.

 

Ici, la population entière voue son activité quotidienne au tourisme. Au sein des classes populaires, les maris sont  maçons, charpentiers, plombiers ou électriciens. La raison est simple, ici, on construit des hôtels. Les femmes quant à elles sont artisanes. Elles fabriquent toute sorte d’objets vendus ensuite sur les « Férias artesanales ».

 

NorteSur renforce les capacités productives des  petits entrepreneurs

 

Fondée en 1985 à Buenos Aires, NorteSur ouvra une antenne à Bariloche au début des années 2000. L’association oriente ses actions autour d’un objectif unique: aider les nouveaux auto-entrepreneurs populaires de Bariloche à s’en sortir.  Valeria nous explique le fonctionnement de son association.

 

D’abord organisme d’éducation, NorteSur assure une assistance technique pour des groupes d’entrepreneurs, abordant la gestion commerciale et la gestion administrative. La ligne de mire étant de fournir des outils et de développer des compétences pour ensuite faciliter l’autogestion des entrepreneurs. Il est important de rappeler que la majorité de ces personnes ne vont pas à l’université.

 

En 2005, NorteSur évolue vers une institution de financement, valorisant l’association des entrepreneurs. L’organisme reçoit un fond de l’état dans le cadre du programme du ministère du développement social, qu’il administre à des groupes d’entrepreneurs, afin de renforcer la solidarité par la garantie mutuelle. Grâce à la mutualisation du crédit et des formations, NorteSur accompagne les entrepreneurs vers la voie de l’indépendance.

 

Au total, 270 auto-entrepreneurs ont bénéficié de la formation de NorteSur depuis sa création.

 

Un programme orienté vers l’amélioration de l’habitat

 

Depuis 2010, NorteSur se dédie à un programme de crédit pour l’habitat. En effet, les hivers sont rudes à Bariloche, les températures descendent à-10ºC. Un nouveau rythme s’installe, les gens se lèvent vers 11h à cause du froid et se couchent tôt devant la gazinière au bois. Un triste constat, les gens meurent de froid, en particulier les nourrissons. Dans certaines maisons, le toit est posé sur les murs laissant des grands courants d’air. De plus, les familles sont nombreuses (5 à 7 enfants) et dorment souvent tous dans la même pièce. L’hygiène de vie est aussi souvent limitée.

 

Dans deux quartiers très précaires de Bariloche, le programme a pris forme. Par groupes de 3 familles, les personnes reçoivent un crédit d’une première valeur de 3 000 pesos (600 €) afin d’améliorer leur logement. Trois postes sont primordiaux:

 

-40% des crédits sont dédiés au raccordement au réseau de gaz, afin de se chauffer en hiver

 

-30% sont dédiés à la création d’une pièce supplémentaire.

 

-30% des crédits améliorent la qualité des toilettes et de la salle de bain

 

Aujourd’hui, c’est 80 familles qui bénéficient de ce programme de financement. Le crédit est à 85% gérée par les femmes, les hommes se chargeant de la construction. Dans ses quartiers très modestes, il n’est facile d’instaurer un climat de confiance entre les gens, mais pour les membres de NorteSur, il est indispensable de franchir cette barrière afin de se rendre compte de la réalité pour pouvoir agir dans la bonne direction. L’accompagnement renforce la solidarité entre les familles, les hommes travaillant ensemble pour rénover une par une les maisons. Ici, les mots ont plus d’importance que les contrats signés.

 

Si la première étape de remboursement du crédit fonctionne bien dans le groupe, un second crédit du double de la valeur initiale est accordé.

 

Valeria nous raconte l’histoire d’une femme qui, le jour où elle reçue son crédit, dit à sa mère : « Je te le jure maman, aujourd’hui c’est la dernière fois qu’on meurt de froid ! «. Elle utilisa le crédit pour finir le toit de la maison.

 

Un programme qui suscite un grand intérêt et qui pourrait s’étendre à d’autres quartiers.

 

Gente Nueva, coordinateur de « banquitos populares »

 

Nous sommes reçus dans une les locaux d’une école d’un des quartiers nord de Bariloche, là où se réunit un « banquito » appartenant au réseau de banques populaires Buena Fe.  Créée en 1998, ce réseau national de banques de quartiers se développe sous l’aile du ministère du développement social depuis 2004, après que sa ministre Alicia Kirchner ne l’incorpore à la Commission Nationale de Microcrédits. Aujourd’hui, c’est 40 millions d’euros de budget global annuel qui est géré par le réseau, 650 organismes de quartiers créés et 50 000 crédits octroyés. 90% des bénéficiaires sont des femmes. Le seul contrat qui s’établit est celui de la « valeur de la parole »

 

Des antennes régionales travaillant avec des associations sur place comme Gente Nueva mettent en place le programme d’accompagnement solidaire.

 

Le microcrédit n’étant pas une fin en lui-même, la complémentarité d’une formation a pour objectif de renforcer l’auto-entrepreneuriat et de développer le commerce local. Blanca et Laura travaillent pour Gente Nueva comme coordinatrice de banque. Elles nous expliquent le programme menant au lancement d’une nouvelle entité :

 

Un groupe de cinq personnes se constitue, chaque associé ayant une activité économique différente. La formation est assurée par un coordinateur suivant la logique des « 7 étapes ». Une étape est vue ici comme un réunion durant laquelle le promoteur oriente les activités économiques, apportant une consultation dans le but d’aider les entrepreneurs à évaluer les coûts, les bénéfices, mais aussi les pertes, les risques et les difficultés quotidiennes. Après avoir passé ce cap des 7 réunions, le groupe se lance dans une « Semaine d’entrainement ». Le groupe choisit alors un nom pour la banque et le coordinateur définit l’échelle progressive du microcrédit accordé. La première somme accordé est normalement de 400 pesos (soit 80€) et peut atteindre 1500 pesos. Les membres commencent à rembourser le premier crédit une semaine après son obtention, et ce sur une période de 24 semaines. En plus du remboursement hebdomadaire, chaque membre de la banque donne en plus un complément servant à alimenter le « Fond d’épargne solidaire » servant de garantie au groupe en cas de problème inopiné d’un des entrepreneurs.

 

Toutes ces rencontres se déroulent au sein d’un centre communautaire, souvent dans des salles de classe réservées le soir. C’est ici que se décide les évolutions stratégiques des activités, le choix des futurs férias fréquentées, les bilans financier etc. Le tout autour d’un maté (boisson traditionnelle argentine) et de quelques gâteaux. Enfin il ne faut surtout pas oublier que c’est un lieu de rencontre où les femmes s’écoutent et se racontent leurs histoires familiales, partagent leurs impressions, leurs espérances et leurs inquiétudes sur leur activité.

 

Aujourd’hui, Blanca et le groupe évaluent les gains de la dernière féria municipale. Des sacs plastiques supplémentaires ont été acheté en gros pour confectionner de nouveaux objets pour la prochaine féria. Les femmes présentent échange et partage leurs nouvelles techniques de confection. 3 personnes sont désignées pour la féria du samedi suivant, où les objets de chacun seront vendus. Blanca récupère l’argent issue des remboursements et de l’épargne, pour ensuite le mener sur le compte commun dans une des banques nationales. L’argent ne reste pas dans un coffre privée.

 

A l’échelle de Bariloche, 10 banquitos ont vu le jour depuis l’arrivée de la branche régionale du réseau de la Buena Fe. La valeur de la parole prime sur le contrat dan ces organisations de quartier qui ont pour objectif d’améliorer la qualité de vie des personnes des classes populaires ayant une ferveur et une passion pour leur travail. La solidarité est ici un moteur sociale pour renforcer l’économie locale.

 

Vos reporter sur place,

 

MG-MT

 

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Une réflexion au sujet de « NorteSur et Gente Nueva stimulent le dynamisme populaire de Bariloche »

  1. Encore un article très intéressant, félicitations à nos reporters pour la qualité de leur travail. Continuez les gars, moi j’apprends plein de choses!

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