La Paz : A la rencontre d’un mouvement national

 

Dans les articles précédents, nous avons abordés à plusieurs reprises la notion d’articulation du mouvement d’économie solidaire et sociale, horizontale et verticale. La première distingue le regroupement des organisations locales, la seconde consiste à changer d’échelle, avec la mise en place de réseaux nationaux et internationaux.

 

C’est un processus nécessaire selon les économistes de l’ESS, qui tend à renforcer les réflexions et l’impact des initiatives locales. Il vise à donner de la crédibilité à un mouvement porté depuis le bas de l’échelle par les acteurs locaux. La multiplication de ces « bulles locales » nous à amené à rencontrer le mouvement national bolivien pour une économie sociale et solidaire et un commerce équitable. Récit d’une lutte collective pour une coopération avec les pouvoirs publics.

 

 

Associations, entrepreneurs, doctorants, chercheurs, représentant du gouvernement, organismes internationaux et le dernier invité surprise Alternavista s’étaient données rendez-vous lundi 19 mars. A l’initiative du Centre d’Etudes et de Coopération Internationale (CECI – Canada)  et de la présidente du mouvement pour l’ESS et le CJ Wilma Quinteros, l’assemblée s’est regroupée autour d’une table ronde afin de partager et d’échanger les expériences en matières d’ESS et analyser l’avancée des actions menées conjointement.

 

La seule présence du Vice Ministre du Commerce Intérieur et des Exportations montre la volonté des acteurs de l’ESS de travailler main dans la main avec les pouvoirs publics. « L’un des objectifs principaux du mouvement est d’avoir une réelle incidence sur les politiques publiques pour qu’elles tendent à améliorer les conditions des petits entrepreneurs, appuyées par des textes de lois », nous commente Wilma Quinteros.

 

Plusieurs chercheurs sont allés s’inspirer des expériences voisines en matière d’ESS. C’est le cas de Beatriz Delgado, qui présente ses travaux après un passage au Brésil. « Cela fait déjà 10 ans que le Brésil s’est doté d’un Secrétariat d’Etat dédié à l’ESS. Il y a de nombreuses avancées, le mouvement est reconnu et impulsé par l’Etat, qui achète par exemple aux producteurs à un prix juste ». L’Equateur quant à lui est un pays souvent cité pour être le seul à avoir intégrer l’ESS dans sa constitution et dans les textes de lois.

 

Certains représentants d’associations d’artisans et de producteurs boliviens ont fait le déplacement. Leur intérêt est tourné vers les organismes de finances solidaires, à qui la seconde partie de l’atelier est réservée. « Nous devons évidemment conter sur les finances solidaires, qui doivent être soutenues par les politiques publiques de la même manière. Plusieurs banques se disent de microcrédit populaire mais ne répondent pas aux critères des producteurs, les requis étant inatteignables tout comme la hauteur des crédits prêtés » continue Wilma.

 

 

Porte parole de son association regroupant 1300 familles d’artisans, Emilana Yogua nous confie que « La qualité des produits est très liée à la l’organisation et à la gestion économique et financière, à l’analyse des coûts. Nous partageons nos idées sur la production, l’innovation, la qualité. Ces échanges internes résultent de la solidarité qui nous lient et nous font travailler dans cette logique d’économie sociale et solidaire de manière efficace »

 

Au total, 75 organisations ont rejoint le mouvement bolivien depuis sa création en 2008. « Le réseau devrait croître plus rapidement, mais nous avons la volonté de renforcer les organismes productifs du pays, en améliorant les capacités de production. Cela passe par des stratégies de formation, d’accompagnement, mais aussi de communication au niveau du gouvernement, du milieu académique et dans les médias », nous affirme Dario Alanoca de l’organisme Caritas Bolivianas, qui fait en plus partie de la table technique du mouvement.

 

 

C’est d’ailleurs sur ces thèmes de diffusion qu’est centrée l’intervention du Monsieur Velasco. Chercheur pour le Forum International d’Economie Sociale et Solidaire (FIESS), il présenta les résultats boliviens d’une étude transversale sur l’ESS quant à l’avancée des politiques publiques dans plusieurs pays du monde comme l’Espagne, le Canada, l’Afrique du sud ou encore le Mali. Enrichi de ces autres expériences, Monsieur Velasco considère plusieurs axes de réflexion pour renforcer les liens entre les pouvoirs publics et la société civile bolivienne :

 

- Renforcer la recherche théorique et appliquée pour avoir des indicateurs visibles et des mesures concrètes de l’avancée des différent formes de l’ESS.

 

- Etendre la plateforme d’associés stratégiques, dans le public au niveau départemental, régional  comme au sein des syndicats et des entreprises.

 

- Jouer sur des terrains compétitifs en matière d’ESS et commerce équitable.

 

- Articuler les stratégies autour d’autres formes du développement comme la sécurité alimentaire, le respect de l’environnement, l’aspect générationnel et l’intégration de la femme.

 

Le FIESS s’est déroulé en octobre dernier à Montréal, devant 86 pays représentés et plus de 1500 personnes réunies. Une marque de l’intérêt mondial porté à l’ESS.

 

L’atelier s’est terminé par une réflexion collective sur les actions à mener pour renforcer le mouvement bolivien d’ESS. Trois groupes de travail se sont formés et doivent rendre compte de l’avancée des travaux boliviens, sous deux mois, et sur les thèmes suivants :

 

- Relation entre la société civile et le secteur public à tous les niveaux

 

- Education en Economie Sociale et Solidaire

 

- Promotion, sensibilisation et diffusion de l’ESS

 

En fin de journée, Wilma nous accorde sa conclusion de cette journée de travail « Il nous manque des campagnes massives de diffusion autour de l’ESS, mais cela représente du temps, de l’engagement et de l’investissement volontaire. C’est aussi passer moins de temps auprès de sa famille. Il n’y a aucun intérêt économique, nous nous battons pour un développement humain intégral, pour que la Bolivie sorte de la pauvreté. Nous allons dans le bon sens, vers l’équité ».

 

 

Partager, réfléchir, agir. L’ESS en Bolivie prend ses racines dans son capital humain.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

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