Banlieue sud de Santiago du Chili, la commune de San Bernardo est le théâtre d’un centre éducatif communautaire très populaire. Fraichement entrés dans ce monde où la dynamique et la diversité des projets imposent le respect, Nestor et Gabriel nous guident dans la découverte de leur ONG: El Canelo de Nos.
Naissance sous la dictature
Les débuts du Canelo sont intimement liés à l’histoire de son pays. Sous la dictature d’Augusto Pinochet, de 1973 à 1988, la privatisation de nombreux secteurs publics (comme la santé et l’éducation) tout comme celle des grandes industries minières, renforce les inégalités au sein du pays. 30% de la population se retrouve en dessous du seuil de pauvreté. Les ressources naturelles sont surexploitées, la croissance des exportations affaiblie le peuple qui ne subvient plus à ses propres besoins.
La répression des opposants au régime fait rage. Au total, plus de 700 000 personnes doivent s’exiler, d’autres restent pour reformer une opposition. Dès lors naissent d’abord des groupes de réflexion et de discussion clandestins pour comprendre la société et la politique, puis une commission nationale des droits de l’homme voit le jour. Des organisations civiles solidaires se forment sous l’aile d’organismes internationaux ou de l’Eglise chrétienne.
Fondé en 1985, sous les dernières années dictatoriales, Le Canelo fait parti de ces organisations civiles. Travaillant au quotidien avec le monde rural, la seule logique est de renforcer le développement local et faire reculer la pauvreté. L’objectif est centré sur la « réappropriation des techniques paysannes anciennes, qui sont des solutions qui marchent en période de crise sociale et environnementale » nous commente Gabriel. La notion de territoire revient au centre du développement, une alternative protectionniste face à l’exportation de masse, visant à satisfaire les besoins fondamentaux et l’autoconsommation.
30 professionnels s’investissent dans cette voie. On y trouve une synergie d’ingénieurs agronomes, professeurs et sociologues, journalistes et experts en communication, techniciens bricoleurs.
Un Etat faible et centralisé, des projets forts et personnalisés
la particularité du Chili en matière de développement vient du fonctionnement étatique. Comparé à l’Etat français par exemple, l’Etat chilien est très faible en nombres de fonctionnaires. Ainsi, l’Etat ne cible que les problèmes existants et lance des lignes de développement auxquelles répondent des organismes privés (comme le Canelo) sous la forme de concours. Le ministère concerné se contente de choisir une proposition et la finance, laissant la réalisation à l’organisme.
Au delà du fonctionnement, cela n’empêche pas le Canelo d’élaborer des propositions aux caractères très personnels, aux tournures proches de ses valeurs environnementales. Le tout étant un jeu de représentation et de communication avec les pouvoirs publics. L’article suivant présente plusieurs projets concrets réalisés récemment.
Diversité de fonds, différents champs d’intervention
A l’aide de fonds internationaux, Le Canelo coopère avec l’UE et plusieurs ONG. A titre d’exemple, dans la région III (le Chili est divisé en XII régions du nord au sud), un processus de désertification et reforestation redonne la fertilité passée de sa région, ce qui profite à la production locale. Malheureusement, le Chili étant devenu le pays le plus riche d’Amérique Latine aux dépens de sa population, les fonds étrangers se font de plus en plus rares.
Enfin, l’organisme dispose d’un fond propre. La richesse de son parc, la qualité de ses locaux et la présence d’ateliers technologiques (voir article suivant) attirent les séminaires. L’argent est investi dans toutes dépenses du site, de l’électricité à la cantine. Le point d’orgue de cet organisme aux multiples facettes n’est autre que sa radio, la Radio Canelo! Cette onde résonne dans tout Santiago et propose du lundi au vendredi, de 7h à 22h, un échantillon d’émissions dédiées aux problématiques sociales et environnementales, non mentionnées par les informations nationales. Un moyen de s’exprimer sur le projet HydroAysen en particuler. Guillermo, Marcelo et Pablo nous ont même invités à nous présenter en direct. Une première pour nous, et en espagnol!
Vos reporters sur place,
MG-MT
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