La Havane : l’éclectisme, témoin de l’Histoire cubaine

 

 

Isolée du reste du monde ; Cuba fascine pour son histoire personnelle et ses mythes révolutionnaires. Terre de contraste, Cuba est énigmatique, contradictoire, fière, belle, détestable. Unique.

 

Si loin de « l’American way of life », la Havane est pourtant la capitale latine la plus proche des Etats-Unis. Son rythme haletant est une bonne entrée sur l’ile dirigée par la famille Castro depuis 53 ans. Il nous dévoile les traits d’un peuple ouvert, bâti sur l’isolement forcé et la conviction de la défaillance du modèle libéral sur le plan social et environnemental. La réponse communiste n’en fut pas moins un modèle idéal, brisant les aspects fondamentaux de la démocratie pour un intérêt collectif ?

 

La Havane est un théâtre à ciel ouvert, un musée aux portes ouvertes. Au milieu des vieilles bâtisses coloniales délabrées, les calèches côtoient les vieilles voitures américaines des années 50. C’est véritablement le premier témoignage de l’embargo imposé par les américains depuis 1962. Les peintures murales remplacent la publicité, glorifiant les héros de la révolution comme un certain Ernesto Che Guevara. Les étalages sont maigres, rappelant les difficultés pour Cuba de s’auto-suffire alimentairement. Dans l’espoir de toucher une commission, les rabatteurs insistent pour que vous assistiez à leur concert de salsa sous les sons de Buena Vista Social Club. Mais vous pouvez vous en détacher sans stress et avec un sourire.

 

La Havane est un choc brutal pour certains, entre incompréhension et séduction. Il n’y a pas d’espace tampon, c’est une confrontation culturelle et idéologique qui s’impose à vous. Mais le charme s’installe, la Havane devient prenante et envoutante. Coupé de toute communication extérieure, les pas vous guident vers la vie active. Dans la rue, le commerce bat son train pour une poignée de pesos. La vie est dure et la rationalisation s’accentue. Il en faudrait plus pour que la vie s’arrête à la Havane.

 

Le soir, cubains et touristes se retrouvent le long du Malecon, cette longue promenade longeant le bord de mer. Ils viennent s’y balader, se rassemblent autour de quelques groupes de « son » et de « salsa » revisitant leurs classiques. Tard dans la nuit, les portes restent ouvertes, les échanges entre balcons se multiplient et la rue reste éveillée. Ici, la notion de mixité sociale n’existe pas. Pourtant, elle se développe dans l’ombre d’un système contraint au déclin.

 

L’idéologie est pourtant bien intégrée, comme en témoigne la plaza de la Revolucion. C’est ici que Fidel Castro y prononça ses grands discours politiques. On y trouve deux portraits géants d’Ernesto Che Guevara et de Camillo Cienfuegos, héros moins connu du grand public mais idolâtré par les cubains. Dominant la place, un monument fut érigé à la mémoire de José Marti. Ecrivain et poète de la fin du XIXème siècle, il fut le principal acteur de l’indépendance cubaine. Ses écrits sont aujourd’hui étudiés par tous les jeunes écoliers cubains.

 

Aujourd’hui encore, les cubains ne satisfont pas tous leurs besoins. Ils vivent avec peu, ils ne connaissent pas la surconsommation. L’isolement les contraint à exploiter leurs ressources de manière durable, tout en ouvrant leur économie au tourisme de masse. Forcée politiquement à perdurer un système poussé à la contradiction, la société cubaine révèle des avancées humaines et se porte en modèle de la cohésion sociale et environnementale. Pourtant, personne ne s’avance sur le futur de Cuba, qui reste flou et sous-contrôle de la famille Castro jusqu’à nouvel ordre. A l’aube d’un changement de paradigme sur l’ile sucrière, une question persiste et dérange : doit on s’inspirer des idées et des avancées d’un pays communiste ?

 

Vos reporters de retour en France,

 

MG-MT,

 

 

Cuba : De l’indépendance à la révolution, un contexte géopolitique complexe

 

En arrivant à Cuba, on se rend compte rapidement que l’on a beaucoup de choses à apprendre et à comprendre de ce pays. Cuba est une énigme permanente, que nous avons essayé de décrypter grâce à son peuple, ce peuple qui nous a raconté son histoire.

 

Terre d’esclavage sous domination espagnole puis américaine, Cuba n’a jamais eu le choix de sa propre destinée. Jusqu’au 1er Janvier 1959. En ce jour, les hommes de Fidel Castro, menés par Ernesto Guevara et Camilo Cienfuegos entrent dans La Havane et prennent le pouvoir. Fulgence Batista se refugie en République Dominicaine, la dictature est renversée. Cette date marque la victoire de la Révolution Cubaine. S’en suivent 53 ans de pouvoir de la famille Castro.

 

Ce n’était pourtant pas gagné d’avance. Cuba obtient son indépendance à la suite du traité de Paris de 1898, et notamment grâce à José Marti (qui meurt peu avant la signature du traité). Même indépendants et souverains, les cubains n’ont pas eu leur mot à dire et ne sont même pas conviés à la signature.

 

Cuba reste sous surveillance américaine. Après le retrait de leur force militaire, le sénat américain vote en 1902 l’amendement Platt. Il impose la construction de la base militaire de Guantanamo, et octroie aux américains le droit d’intervenir militairement en toute situation d’instabilité compromettant leurs intérêts.

 

S’en suit une dépendance de Cuba envers les Etats-Unis, notamment vis-à-vis du commerce de la canne à sucre. L’influence politique s’accentue, les généraux de l’armée cubaine s’imposent en dictateur pour préserver l’ordre économique.

 

En 1952, alors que les élections le donnent perdant, le général Fulgence Batista réalise un nouveau coup d’Etat. Cela laisse amer ses principaux rivaux, dont un jeune avocat de 26 ans nommé Fidel Castro. Ce dernier décide alors de prendre les armes. Nombreux sont ceux qui le rejoignent. Les rebelles s’entraînent et se cachent dans le sud de l’île.

 

Le 26 juillet 1953, Castro et ses hommes attaquent la caserne militaire de la Moncada, à Santiago de Cuba. C’est un véritable échec. Si Fidel et Raul Castro parviennent à s’en tirer, beaucoup d’autres sont capturés, torturés puis exécutés. Quelques jours plus tard, Fidel Castro est à son tour capturé. Son jugement lui offrira une tribune politique où il rédigera lui-même sa plaidoirie : « la historia me absolvera » (« l’histoire m’acquittera »).

 

L’opinion publique ayant très mal réagi aux exécutions de la Moncada, Castro ne sera pas tué mais emprisonné sur l’ile de la Juventud. En 1955, Batista amnistie tous les prisonniers politiques. Castro s’exile au Mexique afin de préparer sa révolution. C’est là-bas qu’il rencontre le « Ché », Ernesto Guevara. Le 2 décembre 1956, Castro et ses hommes débarquent dans le sud de Cuba. Commence alors une longue marche vers la Havane, qui prend fin le 1er Janvier 1959.

 

Les premières réformes de Castro sont tournées vers le peuple. Il réalise une réforme agraire et nationalise les entreprises américaines. La santé devient gratuite, l’éducation également. Il n’y a alors à l’époque pas de différence de classe. La société est très égalitaire, et surtout solidaire. Ce n’est pas nous, mais les cubains qui le disent!

 

En 1961, des mercenaires soutenus pas les USA tentent d’envahir Cuba. C’est le célèbre débarquement de la baie des cochons. Les forces révolutionnaires repoussent l’attaque. Dès lors, les USA imposent un embargo économique sur l’île, toujours en vigueur actuellement. En 1962, l’URSS installe des missiles nucléaires moyenne portée sur le sol cubain. C’est la crise des missiles, on frôle la 3ème guerre mondiale.

 

À la chute du bloc soviétique, en 1991, Cuba perd son principal partenaire économique. L’île entame une période très difficile : la « période spéciale ». Les salaires baissent, le PIB chute de moitié, un rationnement drastique est imposé. Cuba ne disposant de quasi aucune ressource naturelle, le gouvernement décide d’ouvrir l’île au tourisme.

 

Pour pallier le manque d’infrastructures hôtelières, le gouvernement autorise les habitants à louer des chambres. Les touristes peuvent ainsi se loger dans des « casas particulares ». En 2004, le dollar est interdit à Cuba. Le peso convertible (CUC), est alors créé pour le remplacer. Il est indexé sur le dollar. C’est la monnaie des touristes. Mais c’est aussi la monnaie avec laquelle on peut acheter certains produits de première nécessité (papier hygiénique, savon…). Les cubains sont donc très demandeurs de ces fameux CUC. Or les salaires eux, sont payés en peso cubano. Ils varient entre 200 et 800 pesos cubanos, soit entre 8 et 32 CUC. Entre 6.5 et 26 euros.

 

Les premiers à bénéficier de cette monnaie sont les cubains louant des chambres. Les fameuses « casas particulares ». Les touristes les paient en CUC. Mêmes s’ils doivent payer des taxes à l’Etat, leurs revenus sont très nettement augmentés (jusqu’a 10 fois plus qu’en travaillant). Une nouvelle classe s’est créée à Cuba. Celle des gens qui ont des CUC. Des tensions apparaissent entre les gens de milieux différents, la solidarité diminue. Dans la rue, tous les moyens sont bons pour récolter cette précieuse denrée: vendeurs ambulants, trafic de faux cigares, taxis improvisés, faire la manche… Le model cubain, basé sur la solidarité au cœur de la société, est en train de s’effondrer sur lui-même.

 

Aujourd’hui, Cuba reste le pays où la liberté d’expression est la moins respectée. On parle de plus de 15 000 opposants fusillés depuis 1959. Ces violations des droits de l’homme sont néanmoins très peu documentées, car toute organisation présente sur le sol cubain doit être identifiée, contrôlée et orientée par le gouvernement. Reporters sans frontières dénonça à plusieurs reprises Cuba comme tenant le rang de la seconde prison pour journalistes au monde. Cependant, la neutralité et l’indépendance de cette ONG ont été remises en cause à plusieurs reprises par ses membres fondateurs sur le cas de Cuba.

 

Au travers des âges, les cubains font partie de ces peuples qui ont le moins exercé leur souveraineté nationale. De l’indépendance à la dictature, de la révolution à l’oppression, qu’a pu réellement en tirer ce peuple qui sans cesse pâtit de sa situation insulaire isolée ? Chacun est à même de porter un jugement sur Cuba, mais quel jugement portent les cubains eux-mêmes sur le propre sort ? Les avis sont partagés, entre désir d’enrichissement et amour de leur île. La chute du régime castriste annoncera la fin de la chrysalide économique ?

 

Vos reporters de retour en France,

 

MG-MT

 

 

Le Quintana Roo : Paradis blanc et eau turquoise

 

La côte caribéenne mexicaine reste le lieu le plus visité du pays. Fréquentée majoritairement par les « Gringos » (surnom donné aux américains par les mexicains), elle voit débarquer depuis Cancun des millions de touristes chaque année. Le Mexique a mis l’accent sur le tourisme ces dernières années, afin d’oublier son image de pays où seule la violence règne.

 

L’urbanisation de la côte est un véritable désastre écologique. Les complexes hôteliers s’étalent le long des eaux sublimes présentant des variations de bleu invraisemblables. Le gouvernement a vendu sa côte ouvertement aux riches investisseurs, pour une poignée de dollars. Ce dernier circule d’ailleurs à flots aux pays du peso.

 

Néanmoins, il reste des lieux paradisiaques « encore » peu dévastés. Le site de Tulum en fait partie. Cette ancienne forteresse Maya domine le large, construite devant le passage au travers de la barrière de corail. C’est ici qu’Hernan Cortes débarqua avec ses hommes, et débuta sa conquête des terres mexicaines.

 

Au nord, Isla Holbox garde un esprit Robinson Crusoé. Seules quelques voitures de golf circulent, la route n’étant que douce poussière et pistes bossuées. On y apprécie le calme et la volupté des après-midis ensoleillés.

 

Les plus belles plages du Mexique se concentrent sur Islas Mujeres. Au large de Cancun, il n’y a rien de comparable. Le snorkeling (plongée avec masque et tuba) permet à moindre coût d’apprécier les merveilles sous-marines qui se précipitent sur vous comme un objet bizarre.

 

Fort de contrastes, le Mexique nous aura proposé ces multiples facettes lors de notre découverte. Un pays qui mérite d’être connu et aidé dans sa lutte pour un avenir meilleur, loin des images violentes rapportées chaque jour.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

El Mundo Maya : Terre spirituelle, poumon d’une civilisation qui garde ses couleurs

 

 

Le Chiapas,  théâtre du tombeau Maya

 

Laissant San Cristobal de las Casas derrière soi, on ne peut quitter le Chiapas sans s’engouffrer dans la jungle qui borde les montagnes. Sur la route qui mène aux ruines de Palenque, c’est un esprit communautaire et autonome qui règne. Ici, on est loin d’accepter la politique gouvernementale, la population indigène préfère se tourner vers ses origines. Le sang maya vient de leurs gènes, un sang discriminé mais qui ne cesse de croire en la conservation de son modèle de vie, tourné vers la conservation de la nature, comme moyen de survie.

 

La beauté des chutes d’Agua Azul témoigne de la pureté de la région.

 

Nombreuses sont les communautés ethniques qui vivent sur ce territoire, dont les lacandons sont les plus connus. Vivant loin des centres urbains, ils disposent d’une connaissance de la nature, de la médecine traditionnelle, à base de plantes médicinales. Loin du développement, les lacandons vivent avec peu, mais pour longtemps.

 

Tonina, Bonampak, Yaxchilan furent des cités vassales de la grande Palenque, l’un des sites mayas des plus étendus. Les archéologues y ont d’ailleurs découvert la tombe de Pakal, grand souverain de la cité de Palenque qui vécut ses 80 ans ! Il ordonna lui-même la construction de son tombeau, où l’on retrouva des ornements d’une valeur inestimable.

 

Mais le mystère des mayas perdure. Contrairement aux aztèques, ils ne furent pas exterminés par les espagnols. La civilisation maya s’effondra autour des années 1000, mais plusieurs hypothèses persistent. On parle de guerre interne, de catastrophe écologique ou d’incident démographique…

 

Aujourd’hui, les mayas sont connus pour leur prédiction de « la fin du monde ». En se penchant sur l’origine de cette prophétie, on se rend vite compte que le 21 décembre 2012 n’est que la fin d’un cycle du calendrier  maya, entrainant la venue d’une nouvelle ère, sous le signe de la spiritualité. L’humanité se réveillera le 22 décembre, peut-être avec une conscience nouvelle.

 

Le Guatemala, berceau de l’apogée Maya.

 

Le Guatemala se trouve au cœur de l’ancien empire Maya.  Le véritable nom de ce pays est d’ailleurs « COA’TEMALA », ce qui signifie « terre de l’eternel printemps », « terre de toutes les couleurs ». Bien que colonisés par les espagnols en 1524, les guatémaltèques revendiquent leur identité indigène. Aujourd’hui encore, une vingtaine de dialectes Mayas sont parlés au Guatemala. La majorité de la population est de sang originaire. Comme au Mexique, elle n’est pas représentée dans la vie politique et sociale du pays.

 

 

 

Enfoui dans la jungle, Tikal (« le lieu des échos ») est le plus grand et sûrement l’un des plus beaux sites Mayas d’Amérique Latine. Construit à partir du VIIème siècle avant J.C., il s’étendait sur une surface de 160 km² à son apogée. C’était un centre religieux et une cité active.

 

Les Mayas construisirent de nombreuses pyramides dont la plus haute, le temple IV, culmine à 64,60 mètres de haut. La cité sera progressivement abandonnée au cours du déclin de la civilisation Maya, vers l’an 900, laissant la nature reprendre ses droits.

 

C’est en 1543 que la ville d’Antigua est fondée. A l’époque, la ville est la capitale espagnole d’un territoire allant du Chiapas au Panama. Mais les tremblements de terre successifs ont eu raison d’elle, et ont contraint les espagnols à déplacer leur capitale vers une autre ville, Ciudad de Guatemala.

 

Elle n’en n’a pour autant pas perdu son charme. Cette ville aux rues pavées et aux vielles bâtisses coloniales est incontestablement la plus belle du Guatemala. À 1500 mètres d’altitude, elle est entourée de trois volcans: l’Agua, le Fuego et l’Acatenango. Ces derniers témoignent de l’activité sismique de la région. La dernière éruption conséquente date de 2010, fermant ainsi l’accès au sommet du Volcan Pacaya, non loin d’Antigua.

 

Le Guatemala obtint son indépendance en 1821. Les dictatures et gouvernements totalitaires se sont ensuite succédés jusqu’en 1944. Des réformes sociales sont alors mises en places afin de réduire les inégalités. En 1952, le président Jacobo Arbenz Guzmán lance une réforme agraire. Il redistribue les terres non cultivées du géant américain de l’époque : la United Fruit. Au total, ce sont 900 000 ha qui reviennent à 100 000 familles. En 1954, la CIA et la United Fruit organise un coup d’état et une nouvelle dictature s’installe.

 

En 1960, une guérilla rurale voit le jour. S’en suivent 36 ans de guerre civile, opposant le gouvernement allié aux milices d’extrême droite, aux guérilleros. En 1996, un accord de paix est enfin signé. Cette guerre aura fait près de 200 000 morts, dont une grande majorité d’indigènes.

 

Vos reporters sur place

 

MG-MT

 

San Cristobal de las Casas : Organisation sociale à l’échelle d’une ville

 

L’histoire de San Cristobal est liée à ses communautés indigènes. Dès 1969, l’évêque Samuel Ruiz fonde l’organisme DESMI (Desarrollo Economico et Social de los Mexicanos Indigenas), avec un objectif clair : Sortir les peuples indigènes de l’isolement et la pauvreté. Ils subissent alors une très forte discrimination, allant jusqu’à la non-reconnaissance et le non respect de leurs droits humains les plus aliénables. Défenseur de la théologie de la libération (consistant à libérer les plus démunis de leurs conditions de vie intolérables), l’évêque Ruiz se lance dans une quête de ressources extérieures, afin de résoudre les besoins de la population, de l’accès à l’eau potable aux soins cliniques.

 

Depuis 1979, DESMI est désormais une association civile et poursuit son propre chemin indépendamment de l’Eglise. L’organisation soutient des projets de travail collectif, tout comme l’autodétermination des communautés ayant leur propre idée de développement.

 

Même si l’effectif a diminué de 50% en 10 ans, DESMI s’attache à valoriser la formation de plus de 300 communautés autour de la solidarité dans la production agro-écologique. DESMI intervient notamment dans la commercialisation du café des communautés zapatistes au sein du commerce équitable. Même détaché de l’Eglise, DESMI voit ses fonds solidaires provenir essentiellement d’organismes religieux. On notera l’aide du Comité Catholique Français contre la faim et de l’organisme allemand Pan para el Mundo (traduction espagnole).

 

Aujourd’hui, la coordinatrice Maria Estrella Busco reste optimiste dans le maintien des activités de DESMI. Les fonds sont sur le déclin suite à la crise et aux nécessitées plus urgentes des pays africains. « Le Mexique n’est plus vu comme un pays sous-développé, mais cette année, nous avons enregistré une augmentation de 12 millions de personnes en situation de pauvreté alimentaire supplémentaire ».

 

L’alimentation de base des mexicains est le maïs, denrée normalement accessible par tous… Avant que le Mexique ne devienne dépendant de la production de maïs transgénique à faible coût provenant des Etats-Unis. De plus, l’arrivée des biocarburants transformés à partir de la plante n’a fait que grimper le prix du marché, provoquant une véritable « crise du maïs ». Nombreux sont les petits producteurs du Chiapas qui ont déserté leurs parcelles rurales, du fait de la main mise des industriels sur le marché. Une loi vient même de passer récemment au parlement mexicain, autorisant désormais la production OGM dans les Etats du nord du pays.

 

Il en faut plus pour vaincre San Cristobal. Pour revaloriser la culture locale du maïs, Luz Del Carmen Silva Perez travaille avec 33 femmes de San Cristobal de las Casas au sein de l’organisme Mujeres y Maiz sur sa transformation et sa commercialisation sous forme de tortilla (galette de mais).

 

Aujourd’hui, Mujeres y Maiz achète sa production uniquement à l’échelle locale en provoquant la transition biologique des cultures des petits producteurs. « La hausse du prix ne facilite pas cette transition, car ces producteurs n’ont pas encore la confiance nécessaire dans les techniques agro-écologiques, et ils ont aujourd’hui peur de perdre leur maigre récolte ».

 

Pour augmenter la production locale et saine, Luz Del Carmen cherche à motiver la consommation locale. A long terme, l’objectif est d’établir des partenariats exclusifs entre l’organisation et les producteurs ayant une part organique. Les garanties d’achat sont vectrices de production.

 

En attendant, l’association Mujeres et Maiz fait partie du réseau de producteurs et consommateurs Comida Sana y Cercana (Nourriture saine et proche). Véritable marché responsable, il permet de regrouper la production locale garantissant son propre label.

 

Hector Moguel est un de ces producteurs à la volonté inébranlable. Il défend le fait que les produits locaux doivent être sains et ne pas coûter plus cher. « Au supermarché, on ne sait pas toujours d’où proviennent les produits, et les conditions d’acheminement ne sont pas les meilleures pour les produits frais ».

 

200 familles s’alimentent dans ce circuit court créé par 30 producteurs. « Il y a beaucoup de gens qui viennent le week-end, même si nous changeons souvent de lieux. Au final, les gens nous connaissent sous la forme d’un réseau et non de producteurs organiques isolés ».

 

Avec l’aide du centre de recherche EcoSur, les producteurs ont mis en place une certification participative, à laquelle les consommateurs peuvent même participer. « Chacun a sa manière de travailler, mais nous gardons une ligne commune autour de la production biologique et la diversité dans les produits. On regrette par exemple que la certification Certinex n’ait des exigences que sur le volume et non la diversité ». Ainsi, des groupes d’investigateurs hétéroclites passent en revue les plantations de chacun. On y étudie la nature des produits, et on oriente les producteurs vers la diversité. La participation des consommateurs renforce ce lien de proximité et garantit un label local reconnu.

 

La coopération, c’est une manière d’avancer plus vite dans l’intérêt général. Encore une notion que le Taller Leñateros (littéralement L’atelier des bûcherons) a compris avec en plus une dose débordante de créativité. Cet atelier coopératif est né d’une idée qui nous parait aujourd’hui simple: Recycler le papier. Mais en 1975, auriez vous pensé à récupérer le papier du tout San Cristobal pour le revaloriser sous formes diverses? De l’idée d’Ambar Past, américaine expatriée à l’origine du projet, le Taller Leñateros propose aujourd’hui son style local au monde entier. « Paradoxalement, l’atelier est plus connu à l’étranger! » nous commente Ambar.

 

Sur place, le routard recommande de venir visiter ce monde bien particulier. On y découvre les étapes de la refrabrication de la pâte à papier, en passant par l’impression à l’ancienne dont Gutemberg serait fier, à la finition des livres.

 

Ici, le livre phare se nomme Bolom Chon. Arrivé en 2007, il raconte le folklore musical et artistique de la communauté indigène Tzotzile. Très populaire au Chiapas, il est en ce moment en processus de traduction en langue arabe. A l’heure où nous passions, l’atelier concentrait ses forces sur la finalisation de 100 livres. 2 semaines et 11 personnes à temps plein étaient alors nécessaires. Au total, plus de 250 familles travaillent en orbite autour de la coopérative, fournissant les fibres naturelles, les fleurs, tout en ayant leur propre activité en parallèle.

 

Preuve que le recyclage est à son paroxysme à San Cristobal, il est désormais écrit sur la porte de l’atelier « Nous n’acceptons plus de papier », pour des problèmes… de stocks ! Récemment, le recyclage se tourne vers les cd, pour donner naissance à d’étonnantes compositions. Créatif et coopératif, l’atelier réussit bien son évolution.

 

Avec Majomut en chef d’orchestre, le travail solidaire se porte bien dans la ville de San Cristobal de las Casas, preuve qu’un développement local peut porter ses fruits et dynamiser l’emploi dans les régions non industrialisées et isolées.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

Majomut : Producteur d’un café équitable, insertion dans un monde global.

 

San Cristobal de las Casas est bel et bien le fief d’une mobilisation sociale et environnementale. Majomut, producteur de café depuis 1983, a joué la carte de la production biologique depuis 1992. 30 ans d’évolution, 20 ans dans le commerce équitable, et une multitude d’avancées à l’actif de cette coopérative à la créativité débordante. Inspirez, respirez les effluves de café qui remontent du Mexique.

 

Une coopérative solide et solidaire

 

Drôle de nom pour une coopérative de café, seulement si on s’arrête à la barrière de la langue. Majomut signifie « Oiseaux moqueurs » dans la langue Tzotzile, une des communautés indigènes les plus représentées dans le région du Chiapas, au nord de San Cristobal de las Casas.

 

« Cette richesse indigène est un des fondements qui nous permis de passer aux travers des crises économiques » nous témoigne Fernando Rodriguez, coordinateur de Majomut. Des 940 familles qui composent la coopérative, 85% sont tzotziles, 15% sont Celtzoles. 35 communautés de l’alto Chiapas sont représentées, réparties dans 5 municipalités. « Mais notre force vient aussi de la structure démocratique de la coopérative, de la solidité des organes de direction comme le conseil d’administration qui assure la représentation avec les ONG et le gouvernement ou le conseil de vigilance qui gère les contrôles internes de production et de qualité ». Nous sommes bien dans une forme d’économie sociale et solidaire structurelle, productive et démocratique. « De plus, chaque communauté élit un représentant. Les 35 nominés forment l’assemblée de délégués où les propositions des associés sont discutées et les décisions communes sont prises.

 

La solidité de la coopérative permet de figer les prix du café quand il est acheté au producteur. « Et si il y a un bénéfice, les ressources collectives sont d’abord payées avant que l’excédent ne soit partagé entre les associés au prorata du nombre de kilogrammes de café vendus par chacun », continue Fernando. Une solidarité entre ces « actionnaires productifs », qui reçoivent alors la récompense de leur labeur.

 

La transition organique commencée bien tôt (dès 1992), donne aujourd’hui à Majomut la notoriété d’être quasiment 100% biologique. « les derniers producteurs sont en transition {…} mais tout cela ne s’est pas fait en un jour, la transition fut progressive, de 150 à 250 producteurs etc. » De part sa cosmologie orientée vers la conservation de la terre, la culture maya aida à lancer le processus de transformation. « Nous avons une équipe technique, un ingénieur et un technicien agronome qui forment plusieurs promoteurs au sein de chaque communauté, selon leur taille ». Une transmission qui nécessite peu de ressources et renforce l’engagement de chacun. L’Union des Communautés Indigènes de la Région del Ishtmo (UCIRDI), fut un des organismes auprès duquel Majomut appris énormément.

 

Majomut ne réalise que très peu de publicité. « Nous préférons que nos acheteurs transmettent leur intérêt par le bouche à oreille ». Même si les labels aident à la promotion de la coopérative, la meilleur approche passe par la dégustation.

 

La sélection du grain, gage de qualité du café

 

La sélection du café Majomut passe par des tests de saveur en laboratoire. Plusieurs échantillons de café sont mélangés en petits tas pour évaluer le corps, le goût, l’odeur, afin de classer et de valider la production. « Certains acheteurs exigent une saveur floral par exemple, la sélection du café et la variété sont devenus un gage de qualité spécifique de Majomut ».

 

Deux contrôles viennent s’ajouter dans la production. Le premier en interne, au travers de fiches « contrôle de produit ». Les associés effectuent un roulement et vont à tour de rôle évaluer le travail de leurs voisins, afin de garder la certification biologique. Cette dernière est délivrée par un organisme externe qui se base à la fois sur les fiches techniques produites en interne tout en évaluant sur place les réelles pratiques d’agro-écologie. On pratique ici aussi la conservation du sol, l’élaboration de composte organique comme la bonne gestion du milieu environnemental. La révision et les recommandations faites, les producteurs et la coopérative disposent de plusieurs mois pour remplir les objectifs.

 

Le commerce équitable, branche internationale de l’économie sociale et solidaire

 

Quelle doit être la place de l’économie sociale et solidaire pour une coopérative qui vend un produit comme le café, très peu consommé dans la culture mexicaine? Elle se joint tout simplement au marché global en gardant un prix d’achat au producteur équitable. « L’ESS va plus loin que le marché local. Le travail collectif, l’aide mutuelle, c’est réellement ce que signifie l’ESS. Mais on ne peut pas la laisser à l’échelle d’un territoire. Nous dépendons tous les uns des autres ». Du point de vue de la coopérative, il n’y a pas d’autres marchés possible.

 

Ainsi depuis 19 ans, le label commerce équitable joue un rôle prépondérant dans la commercialisation du café Majomut. Chaque année, une analyse globale de la coopérative est réalisée par l’organisme FLO-CERT. Les inspecteurs s’attardent essentiellement sur l’aspect démocratique, la transparence et la reddition de compte.

 

Mais selon Fernando « on perd de plus en plus les objectifs du commerce équitable ». A la base, le commerce équitable a été créé pour faciliter les conditions d’accès au marché des petits producteurs. Malheureusement « le label commerce équitable coût toujours plus cher chaque année ». La multiplication des nouveaux venus et la logique économique poussent le prix des certifications vers le haut. FLO-CERT s’est séparé en deux organismes donnant naissance à Fair Trade USA, qui a lancé un nouveau label « Commerce équitable pour tous ». Selon Fernando, « ce nouveau label n’est ici que pour perdre le consommateur, et donner la possibilité aux plantations agricoles de grandes échelles utilisant des techniques industrielles, d’intégrer plus massivement le commerce équitable ». « Bien entendu le cercle du commerce équitable doit grandir, mais les conditions d’entrée doivent être clarifiées à la base ». Visiblement, les ces grandes plantations agricoles ont plus de facilités financières et les conditions des travailleurs sont très peu évaluées, ce qui diminue leur légitimité aux yeux de Majomut.

 

Fiers et ne voulant pas se faire marcher sur les pieds, Majomut et plusieurs organisations construisent depuis 2006 un réseau international de petits producteurs : La CLAC ou Coordination d’Amérique Latine et des Caraïbes. Regroupant surtout des producteurs de café, mais aussi de cacao et de fruits, le réseau travaille pour leur nouveau label « petits producteurs » à l’intérieur du commerce équitable. L’objectif est clairement de se différencier des grandes plantations agricoles. « il y a déjà des réseaux d’acheteurs qui sont intéressés par le label, et qui comprennent notre volonté de séparation, par compassion ou tristesse certes, mais le marché commence ici ».

 

Développement communautaire intégral

 

Dans la logique coopérative, Majomut achète à ses petits producteurs de café pour limiter les intermédiaires et garantir un prix juste. Cependant, l’organisme ne bénéficie pas d’une autonomie économique, et se voit dans l’obligation d’emprunter de l’argent à des organismes extérieurs comme Root capital. De plus, le label commerce équitable apporte à Majomut la possibilité de bénéficier d’une avance de 60% des importateurs concernant la vente d’un lot de café. Mais c’est souvent insuffisant et cette avance donne toujours lieu à un taux d’intérêt.

 

C’est pourquoi depuis 2004, les associés de Majomut ont fondé une micro-banque paysanne. Aujourd’hui composée de 514 associés, elle gère plus de 3 millions de pesos mexicains (175 00 €). Cette banque au fond propre leur permet de limiter leur dépendance envers les organismes extérieurs. Ainsi, quand Majomut a besoin d’un fond pour vendre ses lots de café, elle emprunte en partie à la micro-banque. Les intérêts restent ainsi dans le cercle des communautés. « Les associés entrent avec une épargne et ensemble ils prêtent leur argent à un intérêt défini, et tout le monde est gagnant ». En situation d’urgence, une partie du capital peut aussi être prêtée à un des producteurs, à hauteur de son épargne.

 

« Cet outil de financement rural s’est adapté aux besoins des communautés, c’est leur système ». Dans un futur proche, l’objectif est d’atteindre l’autonomie financière de la coopérative dans la vente de son café.

 

Pour conclure le développement communautaire, Majomut a aussi lancé une ligne de production alimentaire, gérées par les femmes. A la fin de l’année 1996, les femmes et filles des associées ont fait part de leur inquiétudes quant à la seule production du café et leur non intégration au travail communautaire. Sans expérience dans la culture d’autres produits, elles estimèrent que les promoteurs pouvaient les aider à développer des jardins communautaires pour la production et l’autoconsommation alimentaire.

 

La taille moyenne des exploitations étant de 1 hectare, la place manquait pour développer une nouvelle production agricole. A l’initiative d’un groupe de femmes, on discuta de parcelles collectives, travaillées selon l’accessibilité et la convenance. La production est aujourd’hui distribuée de manière équitable entre les familles ayant participées. Majomut apporte les outils matériels et la technique, mais travaille aussi avec les femmes pour une production optimisée sous serre de tomates, de champignons, de viande animale et d’œufs.

 

« Majomut, ce n’est pas seulement du café », conclut Fernando.

 

A long terme, l’objectif pourrait être de rejoindre un réseau de producteurs et consommateurs responsables. « Cette avancée nécessite des ressources basiques, de l’organisation, de l’investissement personnel, une camionnette, un partenariat etc. Les légumes auront besoin d’être conservés ». Il ne faut pas oublier la vision première de cette production, limiter les transports vers la ville, toujours coûteux. Chaque chose en son temps.

 

Majomut, producteur de café biologique, assure un développement progressif de sa coopérative et de ses associés dans une logique durable qui vise à améliorer la production et la qualité de vie de ses membres. Son insertion dans un monde global montre la nécessité d’organismes internationaux forts, dirigés par des politiques publiques visant à contrebalancer le marché et permettre une meilleur intégration des petits producteurs.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

San Cristobal de las Casas : Confluence d’organismes solidaires sous fond de zapatisme

 

San Cristobal de las Casas est la première ville fondée par les colons espagnols en 1528 sur le territoire mexicain. Son nom rend hommage a Christophe Colomb et à Bartholomé de las Casas, premier évêque du Chiapas qui défendit la cause indigène lors de la « conquista ».

 

 

La ville regorge de ressources culturelles, autour de ses églises, musées et marchés ouverts. Nombreux sont les indiens qui descendent de leur communauté pour venir commercer dans le monde urbain. La ville est un vaste mélange cosmopolite, entre locaux, membres d’ONG, touristes et observateurs internationaux. Ce rassemblement étonnant découle de la réapparition du mouvement zapatiste dans les années 1990.

« Si no hay justicia para el pueblo, que no haya paz para el gobierno » (« S’il n’y a pas de justice pour le peuple, qu’il n’y ait pas de paix pour le gouvernement »), scandait Emiliano Zapata,  l’un des principaux acteurs de la révolution mexicaine du début des années 1900. Il défendit les paysans dans leur quête de réappropriation de leurs terres.

 

En 1994, les yeux se sont tournés vers cette région unique qu’est le Chiapas. Le 1er Janvier marque la signature de l’ALENA (Accord de Libre Echange Nord Américain), qui associe économiquement le Mexique aux Etats-Unis et au Canada. Le même jour, les indiens zapatistes se soulèvent, prennent les armes et occupent la ville de San Cristobal de las Casas. Sous l’impulsion du commandant Marcos, ils revendiquent de nouveau le droit à la terre, au logement, à la santé, à l’éducation et à la justice. Effectivement, les indiens ne sont pas reconnus par la constitution mexicaine alors qu’ils représentent 10% de la population. Ce sentiment est résumé solennellement par le commandant Marcos :  » Il nous civilisèrent hier et veulent aujourd’hui nous moderniser ».

la répression du gouvernement qui s’en suit est sanglante, mais l’arrivée d’observateurs étrangers augmente la pression de l’opinion de publique, aboutissant à des négociations. Malheureusement, aujourd’hui la condition des indiens reste inchangée. Ceux-ci ne sont toujours pas représentés politiquement.

 

Néanmoins, l’écho international de ce mouvement ne fut pas sans effet au niveau local. Déjà nombreuses, les ONG se sont multipliées, soutenant les projets de développement. San Cristobal de las Casas est devenu le fief de la solidarité à la cause indigène. L’économie sociale et solidaire a su trouver sa place entre les coopératives comme Majomut, producteur de café, ou le Taller Leñateros, atelier de papier recyclé reconnu mondialement.

 

Des organisations comme DESMI (Desarrollo Económico y Social de los Mexicanos Indígenas) ou Mujeres y Maiz, travaillent main dans la main pour améliorer les conditions de vie des locaux. Enfin, des réseaux de producteurs et consommateurs responsables voient le jour sous l’aile d’agronomes travaillant pour une certification participative.

 

La majorité des organisations s’est regroupée dans le Réseau pour la Paix qui traite à la fois des droits de l’homme et véhicule les échanges entre organismes aux idées communes, en matière de développement humain, Un portail internet a notamment été créé pour promouvoir cette initiative (http://chiapas.laneta.org/sitios/sociales.php).

 

Fraîche la nuit, bouillante le jour, San Cristobal de las Casas incarne à merveille la surface d’échange entre deux mondes qui cohabitent sans pouvoir s’intégrer mutuellement. A l’heure où les communautés andines acquièrent leurs droits, le Mexique s’en inspira-t-il?

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

Oaxaca de Juarez : Caractère indigène au passé révolutionnaire

 

Au sud-est de la capitale Mexico, l’Etat de Oaxaca garde les portes des communautés indigènes. Oaxaca de Juarez, homonyme capitale de son Etat, est sans doute l’une des villes qui a le mieux conservée l’héritage colonial du passage hispanique, tout en ayant rebaptisée son nom en hommage au premier président indigène, Benito Juarez.

 

Ce dernier est notamment l’auteur des « Lois de reforme » qui confisquèrent les biens de l’Eglise et permirent le mariage civil. En 1861, la guerre civile dite de « réforme », opposant les libéraux de Juarez aux ecclésiastiques, affaiblit financièrement le Mexique. Benito Juarez suspend le paiement de la dette extérieure ce qui entraine l’invasion française sous les ordres de Napoléon III. S’en suit la déroute française de Puebla, le 5 mai 1862, encore commémorée aujourd’hui comme la grande victoire mexicaine du XIXème siècle. Ce n’est qu’en 1867, avec l’aide des américains, que les mexicains reprirent définitivement la souveraineté de leur pays.

 

Aujourd’hui, le rythme de vie de la cité propose plusieurs façon de visiter le centre historique. Le calme matinal offre un caractère unique à la découverte Zocalo, ponctuée par l’éveil des tables restauratrices et les notes claires venant des arbres.

 

 

La ronde du soleil ameute les passants, qui sont attirés par les chapiteaux dressés pour revendiquer un abus de pouvoir. Il faut rappeler qu’en 2006, Oaxaca fut le siège d’un des plus grands mouvements de contestation du pays. Parti d’une grève générale des professeurs au moi de mai 2006, une première intervention policière courant juin mène à la création de l’Assemblée Populaires des Peuples de Oaxaca (APPO). Les défenseurs de la cause indigène et le mouvement étudiant se regroupent alors sous le même étendard, avec de sérieuses revendications sociales face aux inégalités grandissantes et à la répression comme seule justification du gouvernement fédéral. Les émeutes continuent jusqu’à l’intervention en novembre de la police fédérale, conduisant à une vingtaine de morts. Les leaders de l’APPO sont arrêtés un par un. Cette épisode sanglant du Mexique marque la non-reconnaissance de la politique des pouvoirs publics en place, et le besoin d’une transition.

 

Au crépuscule, les jeux de lumière envahissent le centre ville, rappelant la fête lyonnaise. L’ambiance du Zocalo bat son plein, sous fond de musique traditionnelle.

 

A 15 minutes à l’ouest de la ville, une colline domine les environs. Le site archéologique de Monte Alban fut une des grandes cités de la civilisation des zapotèques. Peu connus, ces derniers rivalisèrent les aztèques et les mayas en leur époque, dénotant des avancées en matière de construction. On y retrouve d’ailleurs les vestiges d’un réseau de canalisation en terre cuite. D’un des côtés de l’amphithéâtre central, l’écho des voix résonne d’une manière très distincte.  L’acoustique était déjà bien utilisée à cette époque.

 

Oaxaca s’endort sur la chaleur du soir, et garde la tête sur les épaules ; les lendemains sont difficiles mais toujours uniques et porteurs d’espoirs.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

Mexico-Tenochtitlan : Berceau de la culture mexicaine

 

 

Longtemps capitale du tiers monde, la ville de Mexico jouit d’une richesse qu’il ne faut pas manquer. Cosmopolite, pleine de vie et d’animation, les artères routières mènent au cœur de la civilisation mexicaine.

 

Aux abords du Zocalo, la place centrale, les ruines de l’ancienne ville aztèque Tenochtitlan furent découvertes en 1978. Sous la direction d’Eduardo Matos Moctezuma, une partie du « Templo Mayor », édifice religieux constitué d’une quarantaine de bâtiments, sortit des décombres.

 

Tenochtitlan fut fondée par le peuple Mexicas. La légende dit que, selon ses prédictions religieuses, ces nomades devaient se sédentariser lorsqu’ils apercevraient un aigle mangeant un serpent sur un cactus(!). C’est en 1325 que les Mexicas virent la prophétie se réaliser, dans la zone marécageuse du lac Texcoco. En 1521, Hernan Cortes et ses conquistadores saccagèrent et brulèrent la majeure partie de la capitale, détruisant tous les symboles religieux indigènes.

 

En dehors de la ville, les ruines de Teotihuacan constitue les plus importants vestiges aztèques découverts jusqu’à présent. Le site est dominé par ses deux édifices majeurs : La pyramide du soleil et celle de la lune.

 

 

 

Mexico est aussi la résidence éternelle de Frida Khalo et de son mari Diego Rivera. Artistes et militants communistes, ils recueillirent notamment Léon Trotsky lors de son exil au Méxique, loin des sbires staliniens. Aujourd’hui on peut visiter la « Casa Azul », leur maison devenue musée, dans le quartier de Coyoacán.

 

Les canaux de Xochimilco rivalisent avec la tranquillité de Coyacán. Plus prisés le week-end par les « chilangos » (surnom donnés aux habitants de Mexico) cherchant à sortir du monde urbain, les barques filent sur l’eau dans une ambiance chaleureuse et colorée, sous la musique des mariachis.

 

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

Arequipa – Canyon de Colca : L’envol du condor

 

Voleuses de vedettes, Lima et Cusco couvrent l’intérêt premier des visiteurs du Pérou. Arequipa reste la troisième ville de la partie sud du pays à découvrir. Au pied du Volcan Misti, c’est le point de départ vers le Canyon de Colca.

 

Méconnu du grand public, il n’en demeure pas moins le canyon le plus grand du monde par sa profondeur. Une longue traversée accrochant les 5000m mène à la ville de Chivay, porte du canyon.

 

 

La route se suspend ensuite autour des lacets qui grimpent vers les hauteurs. A l’arrivée, c’est l’envol du condor. Avec une envergure atteignant les 3m, l’oiseau longe les falaises, surprend les courants chauds pour gagner en altitude et finit par flâner devant les photographes avant de replonger sur ses proies.

 

A la manière péruvienne, Arequipa arbore un centre historique mêlé de colonialisme. Organisée autour de la Plaza de Armas toujours agréablement décorée, les arcades des alentours limitent la pénétration de la chaleur au sein des bâtiments. Ces allées piétonnes sont dynamiques, la jeunesse s’émancipe dans les artères publiques, parade dans les lieux de rencontres.

 

 

 

 

En plein cœur de la ville, le couvent de Santa Catalina est si vaste qu’il est semblable à une véritable cité avec ses rues, ses jardins et ses parcs. Construit en 1579, ce labyrinthe de couleur n’a pas l’apparence de son austérité passé. Jusqu’en 1970, il accueillait 450 recluses sans aucun contact avec le monde extérieur. Transformé en musée, le couvent est désormais le lieu le plus visité de la ville.

 

Arequipa vit, survit parfois. Au détour d’une route, nous voilà si proche du quartier de Cono Norte, immense bidonville du nord de la ville. Ici, les réalités ne sont pas les mêmes. L’eau potable n’est pas d’actualité, la poussière remplace les routes. le gouvernement et l’Eglise poussent la natalité qui ne tend qu’à appauvrir la population et à grossir ces banlieues délaissées. Les politiques sociales ne sont pas au rendez-vous. A qui la faute?

 

 

Au milieu des tôles, des couleurs vives réveillent le quartier. C’est ici qu’œuvre depuis plus de 30 ans l’association « les enfants du soleil », à qui nous consacrerons un article et une vidéo exclusive dans un futur proche. Ces couleurs, elles proviennent du centre éducatif et nutritionnel pour les enfants du quartier, qui éblouissent de spontanéité, vivacité et d’envie dans leurs uniformes d’écoliers.

 

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT