Machu Picchu: Mysticité d’un monde caché

 

 

Incontournable, majestueux, merveille de la civilisation Inca. Logée entre la « vielle montagne » Machu Picchu et la « jeune montagne » Huayna Picchu », les ruines sont la plus étonnante représentation de la vie des Incas. L’admiration, le respect, puis l’incompréhension dominent l’arrivée dans ce lieu de culte, jadis habitée par les incantations envers les dieux Incas. Comment ont-ils pu réaliser une telle œuvre digne des grands bâtisseurs des temps modernes?

 

A l’aube, l’humidité de la jungle dépose un voile mystique gardant précieusement les trésors et secrets demeurant en ces lieux. Un par un, les édifices prennent vie, révélateurs d’un monde caché qui s’ouvre et se referme chaque jour.

 

C’est en grimpant le sommet de la montagne Machu Picchu que l’on comprend l’étendue de la tâche des Incas. La brume effacée, une fine bande de terre sur laquelle s’étend le site archéologique voit ses contours dessinés. Un précipice de chaque côté, ou presque, puisque la technique des Incas pour renforcer la structure du fin plateau fut de réaliser des terrasses en escalier de part et d’autres, avec les pierres du même lieu. A la vue de la conservation et de la faible érosion du terrain, on comprend facilement l’ingéniosité du système de l’époque.

 

 

Tout était réuni pour garder cet endroit sacré loin des yeux du conquistador. Les premières réelles recherches archéologiques datent de 1911. Hiram Bingham entreprit son travail avec l’aide de l’université de Yale. Le site n’ouvrit qu’en 1948.

 

Aujourd’hui, le Machu Picchu accueille tellement de visiteurs que le gouvernement repousse l’échéance de sa fermeture pour une véritable restauration. Tout a été mis en œuvre pour y faciliter l’accès. Une ligne de train Cusco-Aguas Calientes, a été spécialement construite pour rallier ensuite les ruines par une route isolée. Privatisée par les anglais, cette voie ferroviaire express profite de son exclusivité pour afficher des prix exorbitants. Les quelques routard choisiront la voie alternative. 5 fois plus longue, il est possible de longer la voie ferrée sur plusieurs kilomètre en contournant ensuite la vallée complète. De quoi en dissuader plus d’un et donner des regrets quant à l’authenticité d’un tel site. Heureusement, les locaux voyage en train à petit prix.

 

De part sa notoriété, Machu Picchu fait de l’ombre aux nombreuses ruines de la Vallée Inca. Les anciennes cités de Pisac et Ollantaytambo méritent pourtant de s’y intéresser. Toutes deux ont eu un rôle important dans le développement de l’hégémonie Inca, et furent des villes contrôlant les points de passage dans le royaume. Toute deux surplombant les environs, elles gardent aussi les vestiges des constructions Incas, ancrées dans les montagnes de la Vallée. Il est vivement conseillé d’entrer dans le monde Inca par sa Vallée avant de s’attaquer au lieu sacré.

 

 

Malgré tout, il faut le voir pour le croire. Le Machu Picchu traverse les siècles en imposant le respect de toute une civilisation qui perdure dans le coeur et le sang des péruviens.

 

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

Cusco, règne du monde Inca

 

Les années 1400 virent l’apogée de la civilisation précolombienne Inca. A l’époque, Cusco rayonne sur un territoire qui s’étend aujourd’hui de l’Equateur à Santiago du Chili. Une figure emblématique se démarque de cette période de gloire: Le grand Inca Pachacútec.

 

 

Illustre guerrier, il n’en fut pas moins un fin politicien. Il établit le système étatique, établissant les rôles publics de chacun au sein de l’empire. Sa campagne de conquête des territoires voisins n’avait pas pour objectif d’étendre la domination des Incas en écrasant l’autre. Au contraire, les autorités conquises restaient en place. L’influence des Incas servit à la mise en place d’un système de voie commerciale dans le royaume, dans le seul but de prospérer.

 

 

Enfin, vers 1463, Pachacútec fit construire le Machu Picchu, cité mystique dédiée au culte religieux et à l’observation des astres. Les éléments naturels, notamment la terre, le soleil et les astres en général sont toujours présents dans la cosmologie andine, véritablement influencée par les origines de la culture Inca.

 

 

La conquista et l’arrivée de Pizzaro conduit au déclin de la civilisation Inca. Les églises poussent, la christianisation s’opère, entrainant la rébellion indigène à plusieurs reprises. La plus connue fut celle de 1781, quand l’Inca Tupac Amaru unit les communautés des montagnes et gagne plusieurs batailles avant de finir écarteler sur la Plaza de Armas de Cusco, devant une foule indigène révoltée mais toujours oppressée. Les inégalités continuaient en Amérique du Sud.

 

 

Aujourd’hui, Cusco garde son caractère colonial mais conserve tout autant les vestiges de l’eldorado Inca. Les rues étroites aux façades d’élégants blocs de pierre, soigneusement pavées, en font une ville très touristique. Le centre historique reluit, tout comme le TransPeru qui part pour la longue traversée menant Machu Picchu, bifurquant par la vallée Inca.

 

 

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

La Paz : A la rencontre d’un mouvement national

 

Dans les articles précédents, nous avons abordés à plusieurs reprises la notion d’articulation du mouvement d’économie solidaire et sociale, horizontale et verticale. La première distingue le regroupement des organisations locales, la seconde consiste à changer d’échelle, avec la mise en place de réseaux nationaux et internationaux.

 

C’est un processus nécessaire selon les économistes de l’ESS, qui tend à renforcer les réflexions et l’impact des initiatives locales. Il vise à donner de la crédibilité à un mouvement porté depuis le bas de l’échelle par les acteurs locaux. La multiplication de ces « bulles locales » nous à amené à rencontrer le mouvement national bolivien pour une économie sociale et solidaire et un commerce équitable. Récit d’une lutte collective pour une coopération avec les pouvoirs publics.

 

 

Associations, entrepreneurs, doctorants, chercheurs, représentant du gouvernement, organismes internationaux et le dernier invité surprise Alternavista s’étaient données rendez-vous lundi 19 mars. A l’initiative du Centre d’Etudes et de Coopération Internationale (CECI – Canada)  et de la présidente du mouvement pour l’ESS et le CJ Wilma Quinteros, l’assemblée s’est regroupée autour d’une table ronde afin de partager et d’échanger les expériences en matières d’ESS et analyser l’avancée des actions menées conjointement.

 

La seule présence du Vice Ministre du Commerce Intérieur et des Exportations montre la volonté des acteurs de l’ESS de travailler main dans la main avec les pouvoirs publics. « L’un des objectifs principaux du mouvement est d’avoir une réelle incidence sur les politiques publiques pour qu’elles tendent à améliorer les conditions des petits entrepreneurs, appuyées par des textes de lois », nous commente Wilma Quinteros.

 

Plusieurs chercheurs sont allés s’inspirer des expériences voisines en matière d’ESS. C’est le cas de Beatriz Delgado, qui présente ses travaux après un passage au Brésil. « Cela fait déjà 10 ans que le Brésil s’est doté d’un Secrétariat d’Etat dédié à l’ESS. Il y a de nombreuses avancées, le mouvement est reconnu et impulsé par l’Etat, qui achète par exemple aux producteurs à un prix juste ». L’Equateur quant à lui est un pays souvent cité pour être le seul à avoir intégrer l’ESS dans sa constitution et dans les textes de lois.

 

Certains représentants d’associations d’artisans et de producteurs boliviens ont fait le déplacement. Leur intérêt est tourné vers les organismes de finances solidaires, à qui la seconde partie de l’atelier est réservée. « Nous devons évidemment conter sur les finances solidaires, qui doivent être soutenues par les politiques publiques de la même manière. Plusieurs banques se disent de microcrédit populaire mais ne répondent pas aux critères des producteurs, les requis étant inatteignables tout comme la hauteur des crédits prêtés » continue Wilma.

 

 

Porte parole de son association regroupant 1300 familles d’artisans, Emilana Yogua nous confie que « La qualité des produits est très liée à la l’organisation et à la gestion économique et financière, à l’analyse des coûts. Nous partageons nos idées sur la production, l’innovation, la qualité. Ces échanges internes résultent de la solidarité qui nous lient et nous font travailler dans cette logique d’économie sociale et solidaire de manière efficace »

 

Au total, 75 organisations ont rejoint le mouvement bolivien depuis sa création en 2008. « Le réseau devrait croître plus rapidement, mais nous avons la volonté de renforcer les organismes productifs du pays, en améliorant les capacités de production. Cela passe par des stratégies de formation, d’accompagnement, mais aussi de communication au niveau du gouvernement, du milieu académique et dans les médias », nous affirme Dario Alanoca de l’organisme Caritas Bolivianas, qui fait en plus partie de la table technique du mouvement.

 

 

C’est d’ailleurs sur ces thèmes de diffusion qu’est centrée l’intervention du Monsieur Velasco. Chercheur pour le Forum International d’Economie Sociale et Solidaire (FIESS), il présenta les résultats boliviens d’une étude transversale sur l’ESS quant à l’avancée des politiques publiques dans plusieurs pays du monde comme l’Espagne, le Canada, l’Afrique du sud ou encore le Mali. Enrichi de ces autres expériences, Monsieur Velasco considère plusieurs axes de réflexion pour renforcer les liens entre les pouvoirs publics et la société civile bolivienne :

 

- Renforcer la recherche théorique et appliquée pour avoir des indicateurs visibles et des mesures concrètes de l’avancée des différent formes de l’ESS.

 

- Etendre la plateforme d’associés stratégiques, dans le public au niveau départemental, régional  comme au sein des syndicats et des entreprises.

 

- Jouer sur des terrains compétitifs en matière d’ESS et commerce équitable.

 

- Articuler les stratégies autour d’autres formes du développement comme la sécurité alimentaire, le respect de l’environnement, l’aspect générationnel et l’intégration de la femme.

 

Le FIESS s’est déroulé en octobre dernier à Montréal, devant 86 pays représentés et plus de 1500 personnes réunies. Une marque de l’intérêt mondial porté à l’ESS.

 

L’atelier s’est terminé par une réflexion collective sur les actions à mener pour renforcer le mouvement bolivien d’ESS. Trois groupes de travail se sont formés et doivent rendre compte de l’avancée des travaux boliviens, sous deux mois, et sur les thèmes suivants :

 

- Relation entre la société civile et le secteur public à tous les niveaux

 

- Education en Economie Sociale et Solidaire

 

- Promotion, sensibilisation et diffusion de l’ESS

 

En fin de journée, Wilma nous accorde sa conclusion de cette journée de travail « Il nous manque des campagnes massives de diffusion autour de l’ESS, mais cela représente du temps, de l’engagement et de l’investissement volontaire. C’est aussi passer moins de temps auprès de sa famille. Il n’y a aucun intérêt économique, nous nous battons pour un développement humain intégral, pour que la Bolivie sorte de la pauvreté. Nous allons dans le bon sens, vers l’équité ».

 

 

Partager, réfléchir, agir. L’ESS en Bolivie prend ses racines dans son capital humain.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

Santiago de Okola : L’agro-biodiversité comme moteur du tourisme rural

 

Le lac Titicaca, perché du haut de ses 3800m, offre par son climat étonnamment agréable à cette altitude la découverte de la culture andine. Côté Bolivien, la zone est du lac fait partie du parc national Apolobamba. Au creux du lac, la communauté de Santiago de Okola se dresse autour de sa montagne sacrée, « el dragon dormido » (le dragon dormant).

 

Le devoir de mémoire:

 

Nous sommes ici au centre de l’héritage précolombien peu connu. Le territoire de Santiago de Okola constituait une des régions de la cultura Chiripa, une civilisation datant principalement de -500 avant JC. Lui succéda ensuite la civilisation pré-inca Tiahuanacota, après JC. Ces deux mouvements humains furent les pionniers dans l’art céramique, la mise en place des cultes religieux tout comme la manipulation de l’écosystème de manière sédentaire.

 

Au moment de la « Conquista » espagnole, les nouveaux venus craignirent de se rendre dans la région d’Okola à cause d’une malédiction lancée par les autochtones suite au pillage de trésors sacrés autour du lac. Le domaine a donc gardé ses traditions sans prendre part au développement et à la christianisation.

 

L’impact des organismes de tourisme

 

En 2005, deux organismes de tourisme détectèrent le potentiel de cet héritage culturel : Sendas Altas et La Paz on foot. Ensembles, Ils travaillent avec la communauté d’Okola afin de mettre en place un service d’accueil des touristes. La Paz on foot s’investit dans des séjours entièrement dédiés à la communauté quand Sendas Altas l’inclut dans des tours globaux de découverte de la Bolivie et de l’Amérique du sud. Mais comme pour toute activité économique, un potentiel aussi riche nécessita des stratégies d’actions pour développer au maximum l’intérêt pour cette culture.

 

Tourisme + agro-biodiversité = Savoir faire à transmettre

 

Ainsi, Santiago de Okola n’est pas un simple lieu de repos paisible. Certes vous pouvez profiter des activités de plein air en partant à la découverte des plages bordant la montagne du « dragon dormido » et bénéficier d’un hébergement complet. C’est la base du tourisme solidaire. Mais ici à Santiago, l’objectif a été surtout de mettre au centre de l’activité la richesse de l’agro-biodiversité de la région. Grâce à l’organisme ProInpa, Santiago de Okola s’est transformée en un véritable centre de recherche dans la conservation des espèces végétales originaires. On en dénombre 17 au total, et une centaine de variétés. La plupart sont des pommes de terre, à la texture et au goût bien particuliers.

Les touristes ont alors l’opportunité d’en apprendre davantage en matière d’agro-écologie tout comme sur l’origine et les techniques de réintroduction d’espèces anciennes.

 

En plus de faire vivre leur culture, les habitants d’Okola transmettent ce savoir faire agricole oublié, noyé par l’agriculture conventionnelle. Nous sommes face à une réappropriation des techniques ancestrales, ré-enseignées par ceux qui n’ont cessé de les pratiquer.

 

Les femmes d’Okola se dédient quant-à elles à l’apprentissage des techniques textiles. A base de fibre naturelle d’obeja, ces tissus sont très convoités par leur qualité. De plus, toutes les teintes colorées sont issues des plantes locales.

 

Un savoir faire de cette importance se doit-il seulement d’être véhiculé à cette échelle? Comment mettre en place ces pratiques à une plus grande échelle? Cette expérience a pour grand mérite d’apporter une nouvelle réponse à la transmission du savoir, par l’intermédiaire du tourisme communautaire. Une preuve que les problématiques de l’économie sociale et solidaire et d’un développement durable sont ancrées l’une dans l’autre.

 

Depuis Juin 2006, « L’association intégrale de Santiago de Okola » administre le potentiel naturel de son territoire dans le but de conserver les liens de son glorieux passé et éviter la migration des jeunes vers le monde urbain. Un pari réussi qui mérite une meilleure reconnaissance. C’est aujourd’hui un nouveau plaisir de le faire découvrir.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

La Paz-Sucre, Sucre-La Paz, à qui le pouvoir?

 

 


 

L’histoire bolivienne, depuis son indépendance, a vu les deux empires citadins se disputer les pouvoirs de la république. Sucre est bien la capitale constitutionnelle, mais le siège du gouvernement (pouvoir législatif et exécutif) est à La Paz. Cette migration du pouvoir vers les hauteurs de La Paz, survint à la suite de la guerre fédérale de 1899 perdue par Sucre. Seul le siège du pouvoir judiciaire demeura à Sucre quand les politiques fuirent le parlement bolivien, réduit désormais à l’Etat de musée.

 

Aujourd’hui, ces deux cités jumelles sont pourtant très contrastées. La Paz est dix fois plus peuplée mais Sucre garde une qualité de vie nettement supérieure. Un monde étudiant s’y est développé, une effervescence s’est répandue dans la ville. Les touristes apprécient et partent en excursion à la rencontre des cratères des alentours. Pendant ce temps, les rues sont bondées toute la journée, l’ambiance joviale, redorant le blason d’une ville au passé argenté.

 

 

 

Face à elle, La Paz joue la carte économique. Même si son emplacement peu stratégique, dans une cuvette dessinée par le relief, la coupe du reste du pays lors des mouvements sociaux, la ville voit se mélanger modernisme, colonialisme et main d’œuvre abondante. En fin de journée, toute les classes de la population se croisent et s’entrecroisent au coin des marchés qui ont dressé leur tréteaux. La Paz vit par ses locaux. Malheureusement, depuis les hauteurs de l’Altiplano, les campesinos (paysans) rejoignent les hauteurs de la pauvreté en s’entassant sur les flancs de la cuvette.

 

 

Dans un pays très marqué par les cultures indigènes, son président Evo Morales a reconnu la pluri-nationalités. La Paz et Sucre représentent ce mélange national, mais sont-elles vraiment les garants d’une innovation sociale? Les inégalités sont toujours fortes en Bolivie, et on accuse son premier président indigène issu du mouvement paysan d’accorder trop son importance à cette cause. Les villes grondent au son des manifestations, fières de leurs revendications sociales. La Paz et Sucre sauront-elles mener le pays vers les chemin de la gloire?

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

Potosi: L’argent qui volait des vies

 


Culminant à 4200m d’altitude, Potosi est le toit urbain du monde. La ville est perchée sur l’altiplano et se dresse telle une porte vers les grands piliers de la civilisation bolivienne.

 

D’Uyuni à Potosi, un contraste inquiétant se dégage. Les rues se repavent, les gens affluent, l’odeur de la vie locale reprend. On vit la Bolivie.

 

Pourtant, le tourisme est bien présent. De tous les pays, les étrangers se ruent vers les dangereuses mines d’argent, pour une aventure dans l’enfer du monde des mineurs. Potosi  joue avec ses mines, les marchande. Un vrai florilège de faux mineurs défilent dans les couloirs de la mort, mais pour quelques heures seulement.

 

En moyenne, un vrai mineur a une espérance de vie de 10 ans à l’entrée dans la mine, de quoi remettre en cause une éventuelle descente dans ces profondeurs. Alors certes le tourisme des mines enrichit la ville, la glorifie même, mais faut-il le cautionner?

Car au final, le touriste passe à côté de la forme intéressante de ces mines: son système coopératif. Les mineurs s’étant regroupés ont un poids démocratique important. Ils prennent les décisions ensembles et définissent les prix de l’argent, leur minerai, leur ressource. Un poids qu’ils payent néanmoins de leur vie. Malheureusement, aucun mécanisme de transformation de ce métal précieux n’existe en Bolivie, exception faite des petits artisans bijoutiers. La Bolivie se limite à un pays de matières premières, pour lesquelles elle se bat.

 

La politique de son président Evo Morales est clair. Les capitaux étrangers sont les bienvenus mais doivent avant tout développer, renforcer et structurer l’économie du pays. Une inspiration de la politique de Lula au Brésil, qui obligea par exemple Apple à implanter une de ses usines de production sur son territoire pour le marché brésilien.

 

Visiblement, on ne pille plus la Bolivie.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

 

Lago Titicaca – Isla del Sol : Célébration de la vie aquatique bolivienne

 


A 3800m, une véritable mer, un soleil qui vous brûle plus que jamais. Pourtant, leur mer, les boliviens l’ont perdue pendant la guerre du pacifique. Confisquée par les Chiliens, c’est sûrement la raison pour laquelle aujourd’hui la Bolivie a le triste titre du pays le plus pauvre d’Amérique du Sud. Isolés, délaissés à leurs ressources naturelles terrestres, les boliviens n’ont néanmoins pas cédé à la tentation de transformer leur lac en une véritable station balnéaire. La vie aquatique est protégée, même si l’on peut déguster de très bonnes truites. L’héritage des communautés andines reste présent de part et d’autre du lac, où les collines sont plus sauvages que peuplées.

 

 

 

Chaque année, le 23 mars est une véritable journée de commémoration de cette mer perdue. Dans la ville de Copacabana, « capitale » du lac, un important cortège défile pour ne pas oublier la perte de ce couloir maritime qui aurait pu tout changer. En fin de journée, la population se regroupe sur les bords du lac pour partager un repas au son des musiques traditionnelles.

 

 

 

 

L’authenticité du lac donne son caractère à la Bolivie, très fière de sa culture indigène, forte au moment de se mobiliser. Les formes du tourisme solidaire se sont développés, gardant l’intégrité de leur patrimoine culturel.

 

 

L’Isla del Sol quant à elle est un véritable joyau, gardant sa mysticité. Une vue imprenable sur le lac et des ruines témoignant d’une vie ancestrale tournée vers la compréhension des astres. Un calme plat qui vous rapproche de la spiritualité et de la cosmologie andine (vision du monde des communautés originaires, en harmonie avec la nature).

 

 

Coupée du monde, révolutionnaire et très diversifiée, la Bolivie mérite une marque de respect pour l’ensemble de son œuvre. Elle reste un des pays les plus engagés dans l’indépendance de l’Amérique Latine, tout en respectant les cultures originaires dominant les communautés andines.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

Cochabamba: La gestion de l’eau au cœur du débat


A mi-chemin entre la Paz et Santa Cruz, les deux plus grands viviers humains de Bolivie, Cochabamba se révèle à la frontière de deux mondes séparés par deux climats. Bordée par les montagnes de l’Altiplano, les températures oscillent au fil du jour. Simultanément, l’humidité ondule pour déverser en abondance les pluies tropicales de la forêt vierge proche. Une vallée fertile s’est donc développée, accrochée à la montagne.

 

La zone urbaine s’étend chaque année, les ruraux migrant vers la cité à la recherche d’un pseudo-eldorado. En se rapprochant de la Selva (la forêt vierge), c’est l’agriculture intensive qui s’éveille. C’est surtout la promesse d’un travail, certes à faible salaire et en désaccord avec la culture indigène, mais sûr. Urgence sociale, urgence environnementale, faut-il choisir en Bolivie? Séraphin et le projet Sara eux ont décidé de prendre le taureau par les deux cornes (voir articles sur le projet Sara).

 

 

 

 

Cochabamba est réputée pour ces mouvements sociaux. La ville fut le siège des plus grandes émeutes subies par le pays ces 20 dernières années. En cause, la privatisation du réseau d’eau et l’interdiction de forer des puits personnels. Une banalité pour les peuples d’occident, une question de survie pour les habitants de Cochabamba. La ressource eau devient petit à petit au centre des problématiques économiques.

 

Honneur au film « Tambien la lluvia » qui décrit ces émeutes du début des années 2000, tout en posant la problème de la discrimination des peuples indigènes depuis la conquista espagnole. Une rencontre entre la vision occidentale et les réalités locales.

 

 

 

 

Malheureusement la Bolivie n’est pas le seul pays qui subit des pressions liées à l’eau. En France, un ancien cadre de l’entreprise Veolia attaqua son ancien employeur, dénonçant les fraudes liées à la privatisation des réseaux d’eau français. Au travers du film « Water makes money », il fit taire le silence que son ancien employeur avait essayé d’acheter, avant de perdre un procès qui lui coûta gros.

 

 

De la France à Cochabamba, la problématique est la même: Jusqu’à quel prix achèteront nous l’eau? Dans les pays les plus nécessitant, la question est cruciale. La goutte qui fera déborder le vase approche-t-elle? La gestion de l’eau, un des défis du XXI siècle.

 

Alors Cochabamba est-elle au bord du gouffre? Leurs revendications sociales entendues, les habitants se tournent vers d’autres projets. A voir la reconnaissance désormais mondiale de son université d’agro-écologie, la ville est déjà entrée dans un processus de transition sociale et environnementale. Un long travail mené conjointement avec les organisations locales, l’université et les institutions publiques. Pourvu que ça dure.

 

Vos reporters sur place,

 

MG-MT

 

Projet SARA: Expérimentation d’un modèle de production durable

 

 

Le centre paroissial développe par l’intermédiaire du projet SARA un modèle de production agro-forestier.  »Nous ne faisons que copier le modèle naturel, la « Pachamama«  (mère nature en langue Queschua) est notre guide sur ce programme » commente Séraphin. Ainsi, l’objectif de ce modèle est de coupler plusieurs espèces végétales, arbres fruitiers, légumes et arbres forestiers dans le but de produire, vendre et consommer durablement. Présentation de ce désordre naturel qui mettra de l’ordre dans vos idées.

 

 

L’agriculture durable, une histoire de « matériel organique »

 

C’est donc ici que le 3eme pilier du projet SARA voit le jour (voir article précédent), comprendre comment chaque organisme interagit avec son voisin. « Si on veut parler d’une vraie agriculture durable, la fertilité du sol doit augmenter et non baisser comme dans toute production monoculture. A force que l’on retourne la terre, le sol devient de plus en plus dur chaque année et les nutriments pour les plantes se font plus rares, obligeant l’intervention d’agents extérieurs artificiels ».

 

C’est dans cette voie que la polyculture arrive progressivement dans le centre parroisial. « Notre proposition, c’est de proposer un modèle aux communautés leur offrant une diversité mais tout en gardant la production et la rentabilité comme objectifs premiers ».

 

 

Ainsi,  nous pénétrons sur la parcelle expérimentale du centre, une surface de 200 m2. La production centrale est la pomme. Les 30 abres fruitiers offriront chaque année 2 caisses de 20 kilos chacun à 250 BOL (25€) la caisse, soit 15000 BOL (1500€), l’équivalent de 12 SMIC boliviens. Sauf qu’ici les pommiers ne sont pas alignés en rang, et en cherchant bien dans cette « Jungle productive », on trouve aussi des navets, du blé, des haricots,  des arbres forestiers plus un complément naturel non planté par Séraphin. « La nature fait son travail en produisant des graines et en produisant de la matière organique, « l’énergie du sol », la fameuse biomasse ». Ce mélange diatonique est bon pour le sol, apportant un équilibre naturel.

 

 

 

Et à la vue des mauvaises herbes, Seraphin reste prudent « tant qu’elles ne gênent pas ma plante, rien ne sert de les couper, elles produisent encore pour mon sol. De plus, tout ce qui est coupé sert de couverture superficielle autour de mes arbres producteurs ». L’idée est de ralentir le processus de décomposition organique tout en apportant du matériel organique en continu. « A quoi sert-il de brûler tout ce que nous trouvons inutile alors qu’il sert à mon sol? » continue Séraphin.

 

On ne parle plus de la même rentabilité qu’en monoculture, où seul le rendement à l’hectare fait foi. « Mais quand on additionne toutes les espèces avec lesquelles je travaille ici, et leur action sur mon sol, on obtient un rendement global sur la durée bien meilleur ». Auto-consommation, production, et durabilité du sol, tout cela fait bon ménage.

 

 

 

 

Quelle échelle pour ce genre de pratique? Vers la fin des machines?

 

Cette pratique est elle vouée à rester locale? Pour l’instant oui, même si Seraphin nous a fait part d’un projet bien plus important en termes de taille de production dans la région de Santa Cruz. Mais ce qui est intéressant ici c’est qu’on ne parle plus d’auto-consommation, il y a une vraie logique de marché orientée vers la connaissance des ressources du territoire et « l’éco-efficacité » par la maitrise de la consommation d’eau, le maintien de la fertilité et la pluridiversité des produits.

 

« On expérimente cette pratique dans le centre mais nous l’avons aussi mis en place dans plusieurs familles. Pour l’instant, cela se fait sur de petites parcelles pour ne pas perdre trop d’argent en cas d’erreurs, car nous expérimentons chaque jour » commente Séraphin.

 

 

Mais ce qu’on retient de cette expérience, c’est que la machine a disparu. Plus besoin de tracteur pour labourer, fertiliser, récolter. « Les passages du tracteur dans l’agriculture conventionnelle détruisent l’activité sous-terraine en action. Si il y a plus d’espèces sous-terraines (notamment les racines), votre fertilité grimpe, vous n’avez pas besoin de mâchines, la nature se gère toute seule ». C’est aussi moins de travail pour les paysans. En termes de densité, il aurait fallu deux fois la surface pour faire pousser d’un côté le blé, de l’autre les navets et les flageolets. « Ici, on regarde l’évolution de chaque espèce, on travaille sur le désordre naturel ». Bien sûr, il faut connaître les complémentarités des plantes, car toutes les combinaisons ne sont pas bonnes. Certaines espèces d’haricots grimpent sur le blé par exemple, gênant sa croissance . C’est là que la connaissance de l’ingénieur agronome est importante.

 

Cette expérience a le mérite de faire réfléchir sur les évolutions possibles de l’agriculture. Réfutant la monoculture et les pratiques conventionnelles, ces íngénieurs se sont engagés dans une transition productive écologique. Reste maintenant à multiplier ces expériences tout en extrapolant leur échelle à un système de production plus important dans le but d’évaluer son potentiel. Mais rien ne vous empêche de tester cette pratique chez vous!

 

Néanmoins, Un seul véritable frein à ces pratiques existe aujourd’hui selon Seraphin : les certifications. Elles bloquent l’agro-écologie et la production organique. Pourquoi un consommateur devrait payer plus cher pour un produit plus sain? Pourquoi un producteur bolivien doit-il payer 1500€ à l’année pour une certification internationale imposant une règle depuis un bureau? Ces questions sont primordiales et doivent être résolues à plus grande échelle pour booster la production « alternative » qui devrait pourtant devenir la « norme ». Mais à quel prix et qui en seraient les bénéficiaires?

 

Vos reporters sur place

 

MG-MT

 

 

Projet SARA : Renforcement de la production agricole en territoire Aramisi

 

La ville de Cochabamba en Bolivie est réputée pour son université agronome et sa spécialité en agro-écologie. Pourtant, c’est à l’extérieur de la ville, perdu dans les montagnes à près de 4000 m d’altitude que se tient un des meilleurs exemples de cas pratique de cette activité. Là où le relief ne facilite pas la production agricole, un groupe d’ingénieurs agronomes travaille en collaboration avec deux paroisses locales afin d’améliorer les techniques de production locales. Rencontre avec Séraphin, défenseur d’une véritable agriculture durable pour des communautés abandonnées à leur territoire.

 

 

De la spiritualité à l’agronomie

 

En 1996, la communauté Aramisi a vu arriver 2 ingénieurs agronomes et coordinateurs de projets, sous la demande du père de la paroisse, P. Axel Gerling. Cet homme de foi travaille déjà sur les thèmes de la santé et de l’éducation avec les communautés avoisinantes. Voyant que la majorité des familles n’a même pas accès à l’auto-production (les pères et fils partant à la ville pour trouver l’eldorado), il décide de faire appel aux ingénieurs agronomes. Le projet SARA (Servicio de Asesoria Rural Ayninakuy – Service de Conseil Rural Mutuel) est né. Grâce à des fonds internationaux allemands, l’objectif central est de maitriser la production, tout en renforçant la foi des populations dans leur territoire. En effet, les populations indigènes ont une forte croyance dans la « Pachamama » alias « mère nature » en langue Queschua.

 

Le centre paroissial se transforme alors en un véritable terrain d’expérience et lieu de formation. German Vargas et Ricardo Crespo commencent leur travail de production avec 4 familles. Aujourd’hui, c’est 400 familles qui ont bénéficié des connaissances en agronomie et peuvent désormais vendre sur les marchés locaux en plus de subvenir à leur propre consommation. Le secret de leur réussite? La maîtrise des ressources territoriales et le respect des plans « naturels ».

 

 

Oui, car avant d’orienter véritablement leurs actions vers l’agro-écologie, il fallait transformer le terrain montagneux en un véritable lieu de production. Pas simple sur le papier, les ingénieurs ont mis en place un système de terrasses adapté au relief. Un véritable découpage qui favorise la surface de production tout comme l’écoulement des eaux de ruissellement et leur infiltration, mais limite aussi l’érosion des sols. Depuis 3 ans, la protection du sol et surtout de sa fertilité deviennent alors le centre du projet. Le centre paroissial évolue lui aussi ses formations vers les pratiques d’agro-écologie

 

 

Le programme SARA : 4 objectifs indissociables sur 3 ans.

 

Récemment arrivé dans l’équipe, Séraphin nous présente le centre et plusieurs productions agricoles de la communauté. Son entrée est dûe à l’évolution du projet SARA. Désormais, 4 « piliers » sont traités simultanément:

1) La protection du sol et de sa fertilité

2) La gestion et l’optimisation des systémes d’irrigation

3) La mise en place d’un système de production diversifié basé sur la polyculture rapprochée et l’intégration dans l’environnement naturel de base.

4) La réintroduction d’espèces arboricoles anciennes

 

 

Ici, la famille des pesticides a été bannie il y a bien longtemps, car originairement inexistante. « Si un insecte vient détruire ma plantation, c’est ce que nous avons fait une erreur » nous affirme Seraphin « C’est un simple indicateur, à nous de faire le nécessaire pour rectifier le tire, mais nous ne parlons pas de maladie à éradiquer ». Et quand on parle des biopesticides (qui sont en fait des substances naturelles controlant certaines maladies des plantes), Seraphin est clair « ils ne changent que la couleur de l’étiquette, et ne sont développés que pour le business ».

 

Quelles sont alors les solutions pour garantir la fertilité du sol? « Expérimenter et apprendre de la nature environnante, le désordre est bien l’ordre de la nature!« . En ce qui concerne le premier point, les ingénieurs se sont penchés sur des engrais organiques, de véritables « bouillons » adaptés pour certaines cultures, à base d’eau et de minéraux organiques. Les formules magiques n’existent pas, mais l’analyse des sols permet de décortiquer le « matériel organique » nécessaire au développement des plantes. Nous analyserons le deuxième point plus précisément dans l’article suivant.

 

 

L’irrigation reste un des problèmes majeurs dans ces régions à deux saisons annuelles. Les pluies abondent de novembre à mars mais se font rares le reste de l’année. Il a fallu optimiser la gestion des sources d’eau naturelles montagnardes. Une technique de stockage d’eau sous la forme d’un puits circulaire a été envisagée, récupérant les faibles courants d’eau. Un système de canalisation permet ensuite d’innonder les terrasses les unes après les autres par gravitation, le puits étant toujours situé au point le plus haut de la production agricole. D’autres systèmes comme l’arrosage rotatif permettent de réduire la consommation d’eau, sans consommer d’énergie complémentaire.

 

 

Pourquoi réintroduire enfin des espèces d’arbres  »originaires »? Pour la diversité naturelle, les apports nutritionnels au sol dans cette région au climat montagneux, mais aussi pour la qualité du bois. « Certains arbres anciens donnent du bois doux pour la fabrication d’instruments de musique comme le Charango (petite guitare d’Amérique latine), tout comme des ustensiles de cuisine. »

 

Au total, le centre parroquial accueille 7500 m2 d’agriculture, et produit une grande variété de légumes, fruits et céréales pour la propre consommation des membres du centre. Tous les ans, plusieurs séminaires sont organisés au centre, qui peut accuellir 40 personnes sur plusieurs jours. Des ingénieurs étrangers viennent participer et apprendre des techniques boliviennes, notamment le chilien Enzo Solaris, que nous avions rencontré au « Canelo de Nos« . Preuve qu’une mini-articulation se met en place…

 

Vos reporters sur place

 

MG-MT